Comment Kizito Mihigo est-il mort ? Selon la police rwandaise, Kizito Mihigo se serait pendu à une fenêtre de sa cellule à l’aide d’un drap. Plusieurs ONG de défense des droits humains, dont l’ACAT-France, doutent de cette version des faits, faute de transparence dans l’enquête menée par le Bureau national des enquêtes (RIB) – dont le rapport n’a jamais été rendu public de même que l’autopsie – et le fait que Kizito Mihigo avait déjà fait l’objet de violences, de menaces de mort et de quatre années de prison pour une simple chanson : « Igisobanuro cy'urupfu» (L'explication de la mort). Dans ce titre, sorti en mars 2014, Kizito Mihigo abordait à demi-mots les crimes commis contre les Hutus par l’Armée patriotique rwandaise (APR), un sujet tabou au Rwanda.
Emprisonné entre 2014 et 2018, à la suite d’un procès politique où il a été condamné pour « formation d’une association de malfaiteurs, de planification de meurtre et de complot d’attentat contre le pouvoir en place ou le président », Kizito Mihigo souhaitait fuir le Rwanda où il ne se sentait plus en sécurité après avoir bénéficié d’une grâce.
Conformément au Protocole du Minnesota (1), les obligations de l’État de respecter et protéger le droit à la vie signifient qu’il est tenu responsable d’une mort en détention, à moins qu’il ne prouve le contraire, notamment dans les circonstances particulières où « la personne décédée… était, avant sa mort, un opposant politique du gouvernement ou un défenseur des droits de l’homme ; elle souffrait de problèmes de santé mentale reconnus ; ou elle s’est suicidée dans des circonstances inexpliquées ».
Etant donné que les autorités rwandaises n’ont mené aucune enquête indépendante, impartiale et transparente visant à établir les circonstances autour de l’arrestation, de la détention et de la mort de Kizito MIhigo, l’ACAT-France appelle les partenaires du Rwanda à œuvrer en vue de la mise en place au Rwanda d’une enquête indépendante, impartiale et complète sur ce sujet, qui réponde aux conventions et traités régionaux et internationaux ratifiés par le Rwanda (2).
« Il est essentiel qu’une telle enquête soit menée avec la participation d’experts étrangers, notamment le Rapporteur spécial des Nations Unies sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, afin d’établir avec précision les circonstances ayant entraîné le décès en détention de Kizito Mihigo, figure de la réconciliation au Rwanda » assure Clément Boursin, Responsable Afrique à l’ACAT-France.
Pour en savoir plus :
https://www.www.acatfrance.fr/actualite/la-mort-suspecte-du-chanteur-rwandais-kizito-mihigo
https://www.www.acatfrance.fr/actualite/mort-suspecte-en-detention-du-chanteur-kizito-mihigo
(2) Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants
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