Après la libération, il y a quelques jours, de Marcelino Ruiz, l'ACAT-France apprend avec beaucoup de satisfaction la libération d'Abraham et Germán López Montejo. Membres eux aussi de la communauté indigène tzotzil , ils avaient été arrêtés arbitrairement et soumis à la torture pour avouer sous la contrainte un meurtre qu'ils n'avaient pas commis.
Arrêtés le 17 janvier 2011, sans mandat d'arrêt, les frères López ont été torturés deux jours durant, tant et si bien qu'Abraham avait fini par rencontrer des difficultés sévères à se lever. Menacés de mort, les deux frères ont été contraint d'avouer être les auteurs d'un meurtre… qu'ils n'avaient pas commis. La procédure s'est en outre déroulée en espagnol, une langue qu'il ne maitrisait pas. Les 20 et 21 août 2019, la sentence tombe et Abraham et Germán écopent d'une peine totale de 75 ans de prison.
Ayant toujours clamé leur innocence, soumis à des procédures dont le caractère arbitraire a été souligné par un groupe d'experts des Nations unies, les frères López ont enfin été libérés le 16 mai dans l'après-midi. Le combat à leurs côtés n'est pas fini pour autant : pleine répération doit maintenant leur être accordée.
La torture au Mexique, un moyen d'enquête qui discrimine les populations autochtones
Au Mexique, la police et la justice ont développé une véritable culture de l’aveu. À défaut de faire émaner la vérité juridique, les forces de police contraignent les personnes interrogées à des aveux. Leur degré d’implication dans l’affaire importe peu. Conséquence, aussi évidente que terrifiante : des personnes pourtant innocentes se retrouvent arrêtées, interrogées, torturées et sous le coup de procédures judiciaires iniques. Et cela, en dépit des règles internationales qui prohibent le recours à des déclarations obtenues sous la contraintes, les juges faisant souvent fi des modalités d’obtentions des aveux. Marcelino Ruiz est l’une des victimes de cette pratique érigée en système. Des mots mêmes du Rapporteur spécial des Nations unies sur la torture, qui en 2014 a évoqué une « endémie inquiétante ».
Les personnes issues des communautés autochtones du Mexique (représentant 21,5 % de la population), comme Marcelino Ruiz, souffrent encore largement de discriminations qui les poussent jusqu'à un haut niveau de marginalisation dans le pays (71,9 % vivent dans la pauvreté voire l'extrême pauvreté). Cela n'est pas sans conséquence graves sur leurs droits fondamentaux. À l'instar des frères López, les personnes autochtones au Mexique sont surreprésentées parmi les victimes de torture et n'ont, souvent, pas accès à des procédures équitables. En violation avec les standards internationaux auxquels le Mexique est pourtant lié.
Pour aller plus loin :
> L'appel à mobilisation du 24 mars 2022 en faveur de Marcelino Ruiz et des frères López