Communiqué

Après 100 jours de manifestations, quel bilan selon l' ACAT?

Alors que deux propositions de loi en réaction à la mobilisation des « gilets jaunes » vont être examinées au Sénat les 7 et 12 mars, l’ACAT publie une première analyse sur la gestion de ces manifestations, avant la publication d’un rapport plus détaillé à l’automne 2019. Elle réitère son appel aux autorités françaises à repenser en urgence la doctrine du maintien de l’ordre qui doit prendre en compte les nouvelles formes de mobilisations citoyennes.
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Le 07 / 03 / 2019

 

Cette analyse, à consulter en intégralité  ici,  alerte notamment les dysfonctionnements observés dans la mise en œuvre de la doctrine du maintien de l’ordre et en particulier sur :

 

  • L’évolution de la doctrine du maintien de l’ordre. Alors que celle-ci était historiquement fondée sur la mise à distance de la foule, le développement de logiques d’interpellation au cours d’opérations de maintien de l’ordre participe à l’accroissement des risques d’affrontements physiques car elles peuvent entrer en conflit avec la logique d’ensemble du dispositif de maintien de l’ordre. Ce phénomène est renforcé par le recours croissant à des forces non spécialisées, lesquelles seraient, selon les premiers éléments rassemblés par l’ACAT, principalement en cause dans l’utilisation massive des lanceurs de balle de défense ces derniers mois et d’un nombre conséquent de blessés.
  • Un nombre préoccupant de personnes blessées et une utilisation disproportionnée d’armes de force intermédiaire dont la dangerosité est avérée. Dans le document joint, l’ACAT examine plus précisément deux armes : les lanceurs de balle de défense et les grenades lacrymogènes instantanées (GLI-F4). L’ACAT s’interroge sur le nombre particulièrement élevé de personnes qui auraient été blessées au niveau du visage par des tirs de LBD alors qu’il s’agit d’une zone qui ne devrait jamais être visée par les forces de l’ordre.
  • L'atteinte de manière directe ou indirecte à l’exercice de certaines libertés individuelles, en particulier celles d’aller et venir et d’assemblée : phénomène de nasses, interpellations et gardes à vue abusives, etc. qui ont pour conséquence d’empêcher ou de dissuader des personnes de se rendre sur les lieux d'un rassemblement ou de les quitter. A cet égard, l’ACAT s’inquiète du nombre de journalistes qui déclarent avoir été blessés dans le cadre de leurs missions ou empêchés d’exercer leurs fonctions par des forces de l’ordre, ce en contravention de l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme relative à la liberté d’expression.
  • La difficulté des autorités françaises à prendre en compte les nouvelles formes de mobilisation qui refusent de « jouer le jeu traditionnel » de la manifestation et défient la mise en œuvre de la doctrine traditionnelle du maintien de l’ordre : occupation durable de l’espace public, absence d’interlocuteurs identifiés par les forces de l’ordre, etc.
  • La nécessité d’une action publique transparente sur l’usage de la force depuis le début du mouvement. Si l’ACAT déplore et condamne fermement les violences dont ont été victimes les forces de l’ordre depuis le début des manifestations, elle rappelle que les allégations d’usage illégal ou disproportionné de la force par certains policiers et gendarmes doivent faire l’objet d’enquêtes rapides et effectives. L’ACAT invite le gouvernement à publier dès maintenant les résultats des enquêtes évoquées par Edouard Philippe le 6 mars en réaction à l’interpellation de la Haute-commissaire aux droits de l’homme des Nations unies.

 

A l’heure où les inquiétudes des instances de défense des droits humains se multiplient, la France ne peut plus continuer à tourner le dos aux réflexions engagées par nos voisins européens sur le maintien de l’ordre. Il est nécessaire de repenser en profondeur notre doctrine afin de prévenir un usage excessif de la force et garantir l’exercice des libertés publiques. Ce travail, qui sera sans aucun doute long, demande un engagement politique fort que l’ACAT attend toujours.

 

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