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France
Communiqué

La dignité humaine absente de la réforme pénale

Si l'actuel projet de réforme pénale contient des avancées, il laisse néanmoins persister des inquiétudes. L'ACAT appelle les parlementaires à l'améliorer.
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Le 2 avril, la Commission des lois de l’Assemblée nationale va examiner le projet de réforme pénale. S’il contient des avancées relatives à l'individualisation des peines et marque une rupture avec la politique du tout carcéral, ce texte laisse néanmoins persister des inquiétudes. L'ACAT invite les parlementaires [1] à apporter à ce texte des améliorations, notamment sur le plan de la dignité humaine en prison.

La peine de prison est fréquemment considérée comme la sanction pénale de référence, la seule « vraie » peine permettant de punir une infraction et d’empêcher son renouvellement. Pourtant, de nombreuses études et statistiques démontrent que dans bien des cas elle n’est pas la sanction la plus à même de prévenir la récidive. « Vouloir simplement enfermer et mettre hors d’état de nuire relève d’une vision à court terme. La question de la réinsertion et de la réhabilitation des personnes détenues est essentielle pour protéger la société », selon Aline Daillère, responsable des programmes prison-justice à l’ACAT.

Architecture, surpopulation, absence de préparation à la sortie, atteintes à la dignité : en l’état actuel des choses, les prisons échouent souvent à réduire le nombre d’infractions [2]. « Les peines effectuées hors de la prison ne sont pas des cadeaux faits aux condamnés. Il s’agit de mesures contraignantes plus efficaces pour assurer la réinsertion des personnes et prévenir la récidive », selon Aline Daillère.

La philosophie globale du projet de loi est positive, car il envisage la réinsertion comme un objectif impératif à la prévention de la récidive et reconnait que la prison, bien qu’indispensable dans certains cas, n’est pas toujours la peine la plus efficace en matière de récidive, notamment s’agissant des courtes peines. L’ACAT apporte son soutien aux dispositions du projet de loi permettant d’individualiser les peines (abrogation des peines plancher, révocation désormais non-automatique du sursis simple).

En revanche, plusieurs dispositions entachent la pleine cohérence de ce projet. La rétention de sûreté, dispositif parfaitement contraire au principe de légalité des peines, ainsi que les tribunaux correctionnels pour mineurs doivent être supprimés. Les parlementaires doivent en outre renoncer à toute distinction entre récidivistes et primo-délinquants dans l’accès aux aménagements de peines, et le seuil d’emprisonnement permettant au juge d’ordonner une mesure d’aménagement ab initio doit être maintenu à deux ans.

« La grande oubliée de ce projet de loi est la question de la dignité humaine en prison. Quelle réinsertion attendre de personnes qu’on atteint dans leur dignité même ? » souligne Aline Daillère. « Alors qu’elle est un facteur essentiel de réintégration et de lutte contre la récidive, la vie en détention n’est absolument pas abordée dans ce projet de loi. Pour tous les actes de la vie quotidienne par exemple, les personnes détenues dépendent d'autrui. La prison devrait encourager les détenus à être acteur de leur propre vie et leur permettre de se responsabiliser pour apprendre à vivre en société dans le respect des lois de la République. »

Aucune réflexion n'est par ailleurs menée quant à l'architecture des prisons, alors même que les derniers établissements pénitentiaires construits font l'objet de maintes critiques qui mettent en exergue une modernité déshumanisée. « Les parlementaires devraient utiliser leur droit de visiter une prison afin de saisir pleinement la réalité carcérale actuelle. » rappelle Aline Daillère.

Contact presse :

Pierre Motin, 01 40 40 40 24 / 06 12 12 63 94 pierre.motin@acatfrance.fr

Notes aux rédactions :

  • [1] L’ACAT a publié un document destiné aux parlementaires "Mieux connaitre pour mieux légiférer", accessible en suivant ce lien.
  • [2] 63% des personnes qui sortent de prison sans aménagement de peine y retournent dans les 5 ans. Or, 80% des détenus sortent de prison sans aménagement de peine. Les courtes peines sont les plus touchées (98% de sorties sèches) – (Direction de l'administration pénitentiaire, " Les risques de récidive des sortants de prison, une nouvelle évaluation", Kensey et Benaouda, mai 2011)
  • Détention