Mobilisons-nous pour leur libération immédiate !
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Au Cameroun, une opposition emprisonnée
Ils sont encore 94 cadres et militants du parti d'opposition Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC) à être arbitrairement détenus dans cinq prisons du Cameroun. Arrêtés dans le contexte des marches pacifiques du 22 septembre 2020, ils ont tous été condamnés à des peines de prison ferme, un peu plus d’un an plus tard, par trois tribunaux militaires, en violation du droit international. Ces civils n’avaient fait qu’exercer leur droit à la liberté de réunion et de manifestation pacifique, des droits protégés par la Constitution camerounaise.
Le procès en appel de 39 cadres et militants du MRC s’est ouvert devant la Cour d’Appel de Yaoundé le 15 septembre 2022. Ces personnes sont pour la plupart d’entre elles en prison depuis deux ans. Elles ont été arrêtées à la suite de la répression violente, par les forces de l’ordre, de manifestations pacifiques survenues le 22 septembre 2020.
Au cours du mois de décembre 2021, les tribunaux militaires de Yaoundé, de Douala et de Bafoussam ont condamné 94 cadres et militants du MRC à des peines allant de six mois à sept ans de prison ferme, pour « révolution, rébellion, attroupement en coaction et en complicité » en vertu de la loi antiterroriste de 2014, loi liberticide. Selon le droit international et notamment les directives et principes sur le droit à un procès équitable de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP), les tribunaux militaires ne devraient en aucun cas être saisis pour juger des civils. Au cours de leurs procès, ces militants de l’opposition n’ont pas pu se défendre librement, ni être jugés équitablement. Parmi les personnes condamnées à sept ans de prison ferme : Olivier Bibou Nissack, porte-parole du président du MRC, Alain Fogué, premier vice-président du MRC, Pascal Zamboue, coordinateur du MRC et Mispa Awasum Fri, présidente de la ligue des femmes du MRC. Aucun des accusés, ni leurs avocats, n’était présents dans les tribunaux au moment des verdicts. Ils avaient décidé de boycotter ces audiences pour dénoncer les procès iniques dont ils avaient été victimes.
Le fonctionnement de la justice militaire au Cameroun permet au Président de la République de pouvoir ordonner, quand il le veut, des fins de procédures judiciaires et des libérations.
Contexte
Le 22 septembre 2020, des milliers de manifestants de l’opposition se rassemblent à travers le pays en réponse à l'appel lancé par le parti d'opposition Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC) pour réclamer un dialogue national, des réformes du système électoral et le retour de la paix dans les régions anglophones du pays. Ces manifestants descendent pacifiquement dans les rues malgré les menaces proférées dans les médias au cours des semaines précédentes par diverses autorités camerounaises qui qualifient ces manifestations comme étant « illégales ». Les forces de l’ordre, déployées en nombre, empêchent les marches et les rassemblements par un usage excessif et disproportionné de la violence, avec des arrestations musclées et une utilisation de gaz lacrymogènes et de canons à eau dans des circonstances injustifiées.
Plus de 500 personnes sont arrêtées le 22 septembre et dans les jours et semaines suivantes. La plupart des prisonniers sont remis en liberté au cours des mois suivants mais pas les cadres du parti. Plusieurs détenus, après leur libération, indiquent avoir fait l’objet de tortures et de mauvais traitements durant leur garde à vue.
Les manifestations du 22 septembre 2020 ont été l’occasion pour le régime de Paul Biya d’entreprendre une vaste campagne de répression visant à briser l’organisation de ce parti d’opposition et son soutien populaire, dans un contexte où le dirigeant du MRC, Maurice Kamto, continuait, malgré les intimidations, de contester les résultats de l’élection présidentielle d’octobre 2018 donnant la victoire au président sortant Paul Biya, au pouvoir depuis 1982.
Toutes les demandes de libérations provisoires venant des avocats de la défense ont été automatiquement rejetées.
Le 12 octobre 2020, plusieurs experts des droits de l'homme des Nations unies demandent au Cameroun de libérer les personnes arrêtées lors des manifestations pacifiques du 22 septembre 2020 et de cesser les intimidations à l’encontre des militants politiques.
En septembre 2021, le collectif d’avocats défendant les 124 militants et cadres du MRC encore emprisonnés indiquent se retirer des procédures judiciaires en cours face « à l’impossible accès à une justice équitable et l’absence d’indépendance des juges ».
Cinq jugements sont rendus par le tribunal militaire de Yaoundé les 27, 28 décembre 2021 et le 17 janvier 2022 condamnant 39 cadres et militants du MRC à de lourdes peines de prison, pouvant aller jusqu’à 7 années de prison ferme. Selon la justice militaire : ils auraient notamment « tenté par la violence de renverser les autorités politiques […], de les mettre dans l’impossibilité d’exercer leurs pouvoirs », « incité à résister à l’application des ordres légitimes de l’autorité publique en outrepassant les interdictions des marches ordonnées par les autorités administratives ». Ils sont condamnés sur la base de : messages WhatsApp et Facebook échangés, banderoles et tracts produits, l’usage de leurs téléphones, discours et messages du MRC, et sur le fait d’avoir projeté de mener des marches pacifiques.