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Le 1er juin 2023, autour de 23 heures, alors que la capitale sénégalaise, Dakar, est encore en proie à des émeutes urbaines à la suite de la condamnation de l’opposant Ousmane Sonko à deux ans de prison ferme pour « corruption de la jeunesse », Pape Abdoulaye Touré, militant au sein du mouvement citoyen Sénégal Notre Priorité (SNP), rentre chez lui. A proximité de son domicile, il est arrêté par des hommes en civil qui tentent de l’emmener vers un véhicule : « C’est la dernière fois que tu parleras » lui affirment-ils. La tentative d’enlèvement ne passe pas inaperçue.

Pape Abdoulaye Touré appelle à l’aide un gendarme posté à proximité. Ce dernier conduit l’ensemble du groupe, victime comme agresseurs, dans les locaux de la gendarmerie qui se trouve à proximité. Un interrogatoire commence. Lorsque le gendarme « Chef Sow » découvre la photo de fond d’écran du téléphone portable de Pape Abdoulaye Touré (montrant l’opposant Ousmane Sonko), il affirme tout haut : « Je te reconnais […] Tu fais partie des boys de Sonko ». Il s’ensuit une séance de tortures qui sera filmée en partie et dont une vidéo d’environ deux minutes sera rendue publique sur Internet, provoquant un scandale au Sénégal, comme l’a révélé l’enquête de La Maison des Reporters.

Dans cette vidéo, Pape Abdoulaye Touré apparaît à genoux, menotté par derrière, épaule droite adossée à un mur décrépi, le nez en sang, l’œil rougi. Il est dans une pièce sombre, bondée de gendarmes en tenue, certains sont munis de matraques. « Chef Sow, est-ce que je peux parler ? » supplie-il. La réplique est brutale : « Brisez-lui les jambes ». Derrière l’activiste, un gendarme s’apprête à lui verser le contenu d’une grosse bouteille en plastique, un mélange de sable et d’eau, utilisé lors des interrogatoires et destiné à rendre plus douloureux les coups reçus. « Ils m’ont fait coucher, dos au sol, avant de me verser l’eau au visage, j’ai failli me noyer », décrit plus tard Pape Abdoulaye Touré.

Durant cette séance de tortures, il recevra de nombreux coups, lui causant de graves blessures : une double fracture à la jambe droite et à la main gauche, de multiples contusions. Il lui faudra attendre neuf mois avant de retrouver la liberté, le 15 février 2024, à la faveur d’une vague de libérations de plusieurs militants de la société civile dans un contexte de décrispation politique entre le pouvoir et l’opposition.

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