Nous sommes le 14 février 2021, aux environs de 2 heures du matin, dans un quartier de Brazzaville, capitale de la République du Congo. Alors que tout le monde dort, des individus en uniforme appartenant à l’unité de police de la Brigade Spéciale d’Intervention Rapide (BSIR), interpellent Dieu Merveille Ebalenini, 19 ans, au domicile de sa tante. Les hommes armés désignent le jeune homme comme étant un membre d’un gang urbain de « bébés noirs », terme désignant les
gangs d’adolescents au Congo. Ce sera la dernière fois qu’un membre de sa famille le verra.
Depuis, Dieu Merveille Ebalenini est porté disparu. Les multiples démarches effectuées par sa famille et l’association Centre d’Actions pour le Développement (CAD) pour rechercher Dieu Merveille, n’ont pas permis de le retrouver. Les autorités congolaises, responsables de cet enlèvement, gardent le silence sur cette affaire. Aucune enquête n’a été ouverte par les autorités judiciaires pour retrouver ce jeune homme. C’est la loi du silence.
Les disparitions forcées sont une constante dans le pays depuis des décennies. Durant la récente guerre survenue dans le département du Pool entre 2016 et 2017, de jeunes hommes – au nombre indéterminé – soupçonnés d’appartenir à la rébellion armée, ont disparu après avoir été faits prisonniers par les forces armées gouvernementales.
Ce bref conflit interne, passé sous silence international, s’est déroulé à huis-clos dans un département fermé à tout observateur extérieur. Aujourd’hui, les victimes de disparitions forcées sont majoritairement de jeunes hommes soupçonnés de banditisme urbain. Sur simples soupçons ou dénonciations, ils voient leur vie en danger du jour au lendemain et peuvent faire l’objet de disparitions forcées, exécutions sommaires, tortures, dans le cadre de la lutte contre la criminalité.
En 2007, le Gouvernement du Congo a signé la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées et a accepté de la ratifier suite aux recommandations de ses partenaires et d’instances internationales. Néanmoins, jusqu’à ce jour, aucune réelle démarche n’a été entreprise au Congo en vue de cette ratification.
Il est temps, pour les autorités congolaises, de faire preuve de responsabilité et d’oeuvrer contre la pratique des disparitions forcées. Cette ratification serait un premier signal fort en ce sens.