Verónica Razo est innocente et doit être libérée immédiatement
Arrêtés arbitrairement il y a 11 ans, Erick Iván et Verónica Razo Casales ont été incarcérés sans procès, sur la seule base d’aveux arrachés sous la torture. Le 27 mai 2022, le huitième Tribunal pénal fédéral a condamné Veronica à 25 ans d’emprisonnement après avoir prononcé l’acquittement et la libération de son frère Erick. Cette sentence n’est pas légitime, Veronica doit être libérée immédiatement.
Le 8 juin 2011, Erick et Verónica ont été violement arrêtés par des policiers fédéraux en civil sans qu’un mandat d’arrêt ne leur soit présenté. Accusés sans preuve, les frères et sœurs ont été sévèrement torturés dans l’objectif de leur arracher des aveux (coups, électrocution dans les parties génitales, violences sexuelles …). Deux jours plus tard, sans être assistés d’aucun avocat, ils ont été contraints de signer une déposition dans laquelle ils se déclaraient coupables de deux enlèvements crapuleux.
Vous souhaitez vous mobiliser pour demander la libération immédiate de Erick et Verónica ?
- Téléchargez la lettre, personnalisez-la avec vos coordonnées et adressez-la par voie postale à Monsieur le Ministre Président de la Cour suprême de justice de la nation mexicaine Arturo Zaldívar Lelo de Larrea.
- Tweetez en mentionnant notamment les comptes @ArturoZaldivarL, @CJF_Mx et @CNDH, postez sur Facebook, faites-le savoir autour de vous !
Une lourde condamnation
A la fin du mois de mai, l’institut fédéral du défenseur public a rendu public la décision ordonnant la libération d’Erick.
Le 27 mai 2022, le huitième Tribunal pénal fédéral a en effet établi que les frères Razo ont été détenus arbitrairement et victime de torture. Ils ont également reconnu les violences sexuelles dont Veronica a été victime. Le juge a par ailleurs admis que les preuves étaient insuffisantes pour inculper les accusés de crime organisé et de trois des quatre enlèvements dont ils ont été accusés.
Cependant, si Erick a été libéré, sa sœur Verónica reste emprisonnée. Elle a été acquittée des autres accusations comme son frère mais condamnée à 25 ans de prison pour le quatrième enlèvement dont elle était accusée. Cette condamnation se base sur deux témoins qui l’auraient reconnu comme « responsable » de cet enlèvement. Le déroulement de la procédure et les pratiques des autorités mexicaines permet de douter de la crédibilité de ces témoignages. Une décennie après leur arrestation arbitraire, l’injustice se poursuit pour la famille Razo Casales.
Des demandes multiples de libération
La mère d’Erick et Veronica et leurs proches ont déposé de nombreuses plaintes et saisis de nombreuses institutions pour demander leur libération, justice et réparation.
En une décennie, plusieurs organismes ont confirmé la réalité des violations subies par le frère et la sœur et ont demandé aux autorités mexicaines de les libérer. Le groupe de travail sur la détention arbitraire des Nations unies avait, il y a près d’un an adopté une opinion dans laquelle ils qualifient la détention des Razo comme une privation de liberté arbitraire violant le droit international.
Après plus de 10 ans de violences et d’abus dans les prisons Mexicaine, il convient avant tout que Veronica retrouve sa liberté. Puis, après les années passées en détention pour des crimes qu’ils n’ont pas commis, Erick et Veronica doivent obtenir réparation pour ce qu’ils ont subi.
Contexte
Les ravages de la « guerre contre le crime »
À son arrivée au pouvoir en décembre 2006, le président Felipe Calderón a déclaré la guerre à la délinquance organisée. Sous prétexte de cette « guerre » contre la criminalité organisée, les gouvernements successifs, les forces de l’ordre et l’appareil judiciaire ont favorisé des arrestations arbitraires et des condamnations massives en recourant à des aveux extorqués sous la torture et à des preuves illicites. On compte au moins 60 000 morts, 26 000 victimes de disparition forcée, 250 000 déplacés internes et des milliers de personnes torturées au cours de leur garde à vue et de leur détention. Certaines associations ont qualifié ces faits de crimes contre l’humanité.
Le nouveau président en poste depuis décembre 2018 n’a pas inversé la tendance malgré ses engagements dans ce sens. Dans la majorité des cas, les personnes subissent des violences physiques et psychologiques lors de leur arrestation, de leur transfert et des premières heures de détention. Dans de nombreuses affaires, des agents du ministère public sont accusés de couvrir des arrestations et des détentions arbitraires, de torturer les détenus et de fabriquer des preuves. Des juges se font également complices et n’ordonnent pas d’enquête en cas d’allégation de torture, tandis que des avocats commis d’office couvrent et taisent les atteintes aux droits de leurs clients.
La torture comme première méthode d’enquête
Au Mexique, la police et la justice ont mis en place une véritable culture de l’aveu. À défaut de mener une enquête effective et d’établir la vérité, les policiers forcent des aveux en faisant presque systématiquement usage de la torture, et ce peu importe l’implication ou non des personnes interrogées. En raison du haut niveau de corruption et de criminalité organisée dans le pays, les policiers et juges semblent peu enclin à trouver les auteurs des infractions, notamment par peur des conséquences qui pourraient en découler. En raison de cette politique, des personnes innocentes se voient arbitrairement arrêtées, interrogées, torturées, et inquiétées sans autres preuves contre elles, que les aveux obtenus sous la torture.
La Commission nationale des droits de l’homme (CNDH) mexicaine a enregistré une augmentation de 600 % des plaintes pour torture en dix ans. En avril 2014, le rapporteur spécial de l’ONU sur la torture a qualifié le recours à la torture d’« endémie inquiétante » au sein de « tous les corps de sécurité publique, policiers ou militaires » au Mexique. Très souvent, les juges acceptent les confessions obtenues sous la torture, violant le droit des accusés à un procès équitable ainsi que l’interdiction, en droit international, d’invoquer une déclaration dont il est établi qu'elle a été obtenue par la torture comme un élément de preuve dans une procédure.
Une arrestation encourageante
Récemment, au début du mois de février 2022, un de leurs bourreaux qui travaillait alors pour la police fédérale de Mexico, Porfirio Javier Sánchez, chef de la Sécurité de l’État de Aguascalientes, a été arrêté pour torture et fabrication de fausses preuves. Cette arrestation est le résultat d’une enquête ouverte en 2016, liée notamment à l’implication alléguée de ce dernier dans les actes de tortures commis à l’encontre de Erick et Verónica. Cette enquête représente un premier pas vers la lutte contre l’impunité mais plus doit être accompli. L’ensemble responsables de leur arrestation arbitraire et leur torture doivent répondre de leurs actes devant la justice.