« Zéro impunité, zéro corruption » : un nouveau paradigme sécuritaire ?
Depuis 2021, l’État du Chiapas connaît une escalade de la violence criminelle pour le contrôle de son territoire et de ses ressources. Le déplacement forcé interne, les disparitions forcées et les attaques envers les défenseurs des droits ont explosé et mettent les communautés, notamment autochtones, dans une position de grande vulnérabilité. Eduardo Ramírez, gouverneur du Chiapas depuis décembre 2024, a placé la politique « zéro impunité, zéro corruption » au centre de sa stratégie de « pacification » et annoncé la création de la Force de Réaction Immédiate Pakal (FRIP), corps policier d’élite destiné à la lutte contre la criminalité. Largement médiatisées, les premières opérations de la FRIP visaient à combattre les homicides, le vol de véhicules et les extorsions. Cependant, le bilan de ses premiers mois d’existence inquiète les organisations de défense des droits humains.
Les associations et organisations chrétiennes dénoncent de graves violations des droits humains
À peine six mois après sa création, la FRIP (Force de Réaction Immédiate Pakal) est accusée de violences policières. Le Centre de Droits Humains Fray Bartolomé de las Casas, partenaire de l’ACAT-France, a dénoncé en avril 2025 de violentes perquisitions et la détention arbitraire de deux militants zapatistes, qui n’ont été présentés au juge que plus de deux jours après leur arrestation. Son coordinateur de plaidoyer a relevé des cas de torture signalés par les communautés. Las Abejas de Acteal, organisation autochtone et chrétienne promouvant la paix, a également dénoncé des arrestations arbitraires qui auraient été commises par la FRIP.
Compte tenu du climat de peur au Chiapas, les organisations craignent un sous-enregistrement des violences. Les agissements de la FRIP inquiètent particulièrement car son directeur, Álvaro Cuauhtémoc Serrano Escobedo, ancien commandant de la Police Fédérale, a été mis en examen dans le cadre du massacre de Tanhuato, survenu en 2015 dans l’État du Michoacan, durant lequel des policiers auraient exécuté 22 civils et altéré la scène du crime. Il n’a jamais répondu aux sollicitations de la justice et était alors considéré comme fugitif, jusqu’à sa réapparition à la tête de la FRIP. L’ACAT-France se joint aux organisations qui rappellent que « pacification » et construction de paix ne sont pas synonymes et qu’une politique de sécurité publique doit avant tout respecter les droits humains.