Le Comité contre la torture des Nations Unies a rendu public ses recommandations à la suite de l’examen de la France. Plusieurs d’entre elles s’appuient sur les observations de l’ACAT-France.
Dans son rapport, rendu public le 1er mai à l’issue de l’examen de la France mené les 16 et 17 avril, l’instance onusienne formule plusieurs recommandations prioritaires, notamment sur les conditions de détention, l’usage de la force par la police et les enquêtes sur les violences policières. Nombre d’entre elles reprennent les constats et revendications portés de longue date par l’ACAT-France.
Conditions de détention : la surpopulation carcérale pointée
Les experts du Comité se disent préoccupés par la surpopulation carcérale en France et ses conséquences. Ils pointent un nombre de détenus en constante augmentation depuis plusieurs années ainsi qu’une violence accrue au sein de du système carcéral.
Le Comité demande au gouvernement français d’instaurer un mécanisme de régulation contraignant, de sorte qu’aucun établissement ne dépasse les 100% d’occupation – le taux d’occupation actuel global étant de 133%. Les experts préconisent également le développement des aménagements de peine et des mesures non-privatives de liberté. Des demandes formulées dans le rapport alternatif de l’ACAT-France.
Violences policières : pour un usage de la force raisonné
L’instance onusienne dresse également un constat alarmant de l’usage excessif de la force par la police. Les experts s’inquiètent du nombre de décès par armes à feu lors de contrôles routiers ou de refus d’obtempérer, et enjoignent l’État français à respecter ses engagements internationaux en matière d’usage de la force.
D’autre part, le Comité a pointé la dangerosité des armes de force intermédiaire telles que le LBD ou les grenades de désencerclement, et les risques de leur utilisation par la police en contexte de manifestation. Il est demandé à la France de revoir la nécessité d’utiliser de telles armes face à des manifestants, et de former de manière continue et adéquate les policiers et gendarmes sur l’usage de la force.
Autant de demande qui figuraient parmi les recommandations de l’ACAT-France, et un pas de plus vers une possible interdiction du LBD en manifestation, demande historique de l’association.
Enquêtes sur les violences policières : un besoin d’impartialité
Le Comité partage également le constat de l’ACAT-France sur les enquêtes liées aux violences policières, souvent conclues par des non-lieux, des classements sans suite ou des sanctions insuffisantes, voire aucune sanction. Est également pointé du doigt le manque d’impartialité des enquêtes, menées par la police elle-même.
Fait rare, les experts ont délaissé leur approche générale pour évoquer des cas précis, comme ceux d’Adama Traoré — mort à la suite de son interpellation en 2016 — et de Nahel Merzouk — décédé lors d’un contrôle routier en 2023 — avant de déplorer la multiplication de telles dérives.
Le Comité appelle à des enquêtes rapides, indépendantes et approfondies, menées par une autorité extérieure aux forces de l’ordre. Il insiste aussi sur la visibilité du RIO, le numéro d’identification des agents, et demande à la France de publier des données détaillées sur les plaintes, poursuites et sanctions liées à l’usage excessif de la force.
« L’ACAT-France suivra avec vigilance et exigence la mise en œuvre des recommandations issues de cet examen » : le bilan de Solange Moumé Etia, directrice du pôle programmes et plaidoyer de l’ACAT-France
« L’ACAT-France se félicite que le Comité contre la torture ait repris, dans ses recommandations prioritaires à l’attention de la France, l’ensemble des propositions que nous avons formulées, notamment sur la surpopulation carcérale, les allégations de recours excessif à la force par les agents chargés du maintien l’ordre, et l’impartialité des enquêtes en cas de violences policières.
Nous sommes heureux d’avoir pu partager notre expertise sur ces enjeux cruciaux pour les droits humains, et que celle-ci ait été reconnue par le Comité.
L’ACAT-France suivra avec vigilance et exigence la mise en œuvre des recommandations issues de cet examen. La France devra présenter un premier rapport d’étape dans un an, en mai 2026. Nous attendons des avancées concrètes, notamment sur l’identification des agents (RIO), l’encadrement de l’usage de la force, et la conduite d’enquêtes réellement impartiales. »