Alarmées par les informations faisant état de graves violations des droits humains commises à l’encontre des populations civiles en République démocratique du Congo (RDC), les Nations unies demandent l’envoi d’une équipe d’enquête sur place dès 1997. Celle-ci s’y rendra à deux reprises, sans jamais pouvoir effectuer le travail d’investigation planifié. Les enquêteurs indiqueront dans leur rapport que la RDC « n’a manifesté aucune inclination à s’acquitter de l’obligation qui lui incombe de mener une enquête pour identifier les responsables ».
Ce n’est que dix ans plus tard qu’une nouvelle équipe onusienne pourra conduire les recherches nécessaires à la documentation des crimes commis entre 1993 et 2003. Mais la violence n’a pas cessé. Alors que les équipes arrivent à Goma en octobre 2008, les violations des droits humains se multiplient : à Kiwanja, plus de 150 civils sont tués entre les 4 et 5 novembre par un groupe armé. Pourtant, en mars 2009, pendant que les enquêtes de l’équipe Mapping se poursuivent, le gouvernement de la RDC signe un accord de paix avec ce même groupe. Son commandant, Bosco Ntaganda, est nommé général de l’armée congolaise. Il est un personnage connu des enquêteurs du Mapping, qui au même moment documentent les crimes commis par les troupes qu’il commandait en 2002 en Ituri.
En 2009, alors que l’équipe Mapping clôture son enquête, un groupe dirigé par des individus ayant participé au génocide du Rwanda de 1994 entre dans le village de Busurungi le 9 mai : près de 100 civils sont assassinés. La moitié des victimes ont été abattues à coups de machette. Certaines sont ligotées avant d’avoir la gorge tranchée. D’autres ont été délibérément enfermées dans leur maison et brûlées vives ou tuées alors qu’elles essayaient de s’échapper pour se réfugier dans les forêts voisines. Les exactions se poursuivent tout au long de l’élaboration du rapport Mapping, jusqu’à sa finalisation : à l’heure des dernières relectures au cours de l’été 2010, le groupe armé dirigé par Ntabo Ntaberi Sheka lance une offensive ciblant une quinzaine de villages. Plus de 230 femmes sont violées. Cette documentation macabre ne s’est pas arrêtée : depuis le début de l’année 2020, le Haut-Commissariat aux droits de l’homme a déjà publié deux rapports dans lesquels il estime, compte tenu des informations collectées, que des crimes contre l’humanité pourraient avoir été commis en Ituri et dans le territoire de Beni au cours des derniers mois.