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  • Appel à mobilisation

Le journaliste Paul Chouta à nouveau l’objet de violences physiques !.

  • Justice et impunité

Dans la soirée du 9 au 10 mars 2022, Paul Chouta – journaliste et membre de Tournons la Page (TLP) – a été enlevé à Yaoundé en pleine rue par trois hommes en tenue civile. Conduit dans une camionnette en périphérie de la ville, le journaliste a été frappé avec divers objets jusqu’à ce qu’il perde connaissance. Ce journaliste critique à l’égard des autorités camerounaises a déjà fait l’objet de violences physiques et d’une détention arbitraire pendant presque deux années. Une enquête sur son agression récente est en cours.

Paul Chouta fait partie des blogueurs politiques camerounais les plus connus sur Facebook avec une page personnelle avoisinant les 64 000 abonnés, et la gestion de la page « Le TGV de l’info » qui compte plus de 258 000 abonnés. Paul Chouta alimente des débats sur des questions controversées et diffuse des informations que les médias d’État préfèrent ignorer. Proche du Mouvement pour la Renaissance du Cameroun (MRC), le principal parti d’opposition dans le pays, il est ciblé par les autorités pour ses activités.

Paul Chouta après son agression. Tout s’est passé très vite ce 9 mars 2022 autour de 22h00. Paul Chouta regardait un match de football avec des amis dans un bar du quartier de Damas à Yaoundé. À la mi-temps, alors qu’il est dehors, Paul Chouta est abordé par des hommes en civil. Ces derniers se jettent sur lui. Il crie à l’aide mais il n’a pas le temps de résister. Il est poussé violemment dans un véhicule qui démarre aussitôt les agresseurs rentrés dedans. Ils utilisent la chemise de Paul Chouta pour lui masquer le visage. Après avoir roulé quelques kilomètres, la camionnette s’arrête à la périphérie de la capitale, près de l’aéroport international. Le journaliste est mis à genoux. Les agresseurs lui disent qu’il est têtu et qu’ils allaient le tuer. S’ensuit alors une bastonnade à coups de pieds, pierres, briques, bâton et fouet. Paul Chouta perd très vite connaissance. Lorsqu’il reprend conscience, il ne voit plus de son œil droit, son visage est tuméfié et il souffre énormément. Il réussit néanmoins à marcher difficilement dans la nuit pour demander de l’aide puis il est conduit à l’hôpital où il y reçoit des soins.

Le lendemain, 10 mars au matin, la police est venue l’interroger à l’hôpital. Les images de la caméra de surveillance du bar ont été saisies par la police. Une enquête est en cours selon les autorités.

Depuis plusieurs années, Paul Chouta fait l’objet de régulières menaces anonymes et de commentaires haineux sur les réseaux sociaux du fait de ses reportages critiques vis-à-vis des autorités en place et de son président Paul Biya. Le 31 janvier 2019, il a été agressé devant son domicile à Yaoundé lorsque trois hommes en civil l’ont poignardé avec un couteau. Il a été sauvé par des voisins venus à son secours, forçant les agresseurs à s’enfuir. Cette agression est restée sans suite et leurs auteurs jamais identifiés.

La police camerounaise doit faire son travail et rapidement identifier les auteurs de cette nouvelle agression pour qu’ils soient traduits en justice. L’impunité des auteurs et responsables de violences contre les journalistes laisse apparaitre une politique d’intimidation à l’encontre de ces journalistes.

Mobilisons-nous pour appeler les autorités camerounaises à veiller à ce que l’enquête aille jusqu’au bout ! 

  • Tweetez notamment le compte @PR_Paul_BIYA , postez sur Facebook, faites-le savoir autour de vous !

Contexte

Au Cameroun, malgré la pluralité des médias – le pays compterait plus de 600 organes de presse écrite, près de 200 stations de radio et une trentaine de chaînes de télévision selon les autorités camerounaises – la liberté de la presse est un sujet préoccupant.

Les autorités camerounaises essayent de tout contrôler et intimident ceux qui s’éloignent de la vision prônée par le régime en place sur les sujets délicats comme le conflit dans les régions anglophones, l’état de la démocratie dans le pays, la répression contre l’opposition politique, les violations des droits humains, la corruption de l’élite au pouvoir… Les médias et journalistes indépendants camerounais qui traitent de ces sujets et adoptent des positions critiques à l’égard des autorités font régulièrement l’objet de menaces de sanctions à la liberté d'exercice de leur métier.

La loi antiterroriste de décembre 2014 est utilisée au Cameroun comme un outil de répression destiné à « imposer silence aux opposants et réprimer la dissidence » selon le Comité de Protection des Journalistes (CPJ). Plusieurs journalistes font ou ont fait l’objet de détentions arbitraires et de poursuites judiciaires iniques devant des instances militaires sur la base de cette loi liberticide, notamment le correspond de Radio France Internationale (RFI), Ahmed Abba entre 2015 et 2017. Il y aurait selon le CPJ encore six journalistes camerounais en prison dont Tsi Conrad, condamné à quinze ans de prison ferme, en mai 2018, pour avoir informé des premières manifestations de mécontentement des populations anglophones en octobre 2016 et leur répression.

A cela s'ajoutent les actes d'intimidations et de violences physiques à l’endroit des journalistes. Parmi ces victimes, le journaliste de Chillen Music Television (CMTV), Samuel Wazizi, accusé d’être un « terroriste » par les autorités du Cameroun. Arrêté par la police à Buea, en août 2019, il est porté disparu depuis lors. Il serait mort en détention à Yaoundé. Jusqu’à ce jour, aucune enquête n’a permis d’établir les circonstances de son décès. Il est probablement mort sous la torture.

Au cours des dernières années, l’utilisation des réseaux sociaux a explosé au Cameroun selon International Crisis Group (ICG). Blogueurs, activistes et chaînes de télévision privées actifs sur les réseaux sociaux ont pris des parts d’audience aux médias d’État et à leurs informations souvent partisanes. Ce changement dans le paysage médiatique entraîne une crispation supplémentaire des autorités en place, qui n’ont pour l’instant aucune emprise sur la diffusion d’informations sur les réseaux sociaux hormis la capacité de limiter l’accès à Internet, ce qu’ils ont fait dans les régions anglophones à plusieurs reprises en 2017 et 2018.

Le Cameroun pointe aujourd’hui au 135ème rang sur 180 pays dans le classement mondial de la liberté de la presse 2021 établi par Reporters Sans Frontières (RSF). La liberté de la presse s'est particulièrement aggravée depuis la réélection contestée de Paul Biya en 2018. Pour RSF : « le Cameroun poursuit sa longue marche arrière en matière de liberté de la presse et fait désormais partie des pays les plus dangereux pour l’exercice du journalisme sur le continent ».

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