Si la liberté religieuse est garantie par la Constitution, la réalité est autre pour les quelque 3 millions de chrétiens du Pakistan. Victimes d’attentats, de conversions forcées ou de violences comme celles du quartier de Jaranwala dans le Pendjab qui ont eu lieu le 16 août 2023, les chrétiens doivent faire face à des persécutions croissantes.
Mariyum Lal et Newsh Arooj : symboles de la persécution des chrétiens
Le 9 avril 2021, Mariyum Lal, 54 ans, et Newsh Arooj, 21 ans, deux infirmières chrétiennes de Faisalabad, ont été arrêtées par les autorités pakistanaises pour avoir prétendument profané le Coran en nettoyant un casier. En représailles, Mariyum a été agressée au couteau par un employé musulman. En août 2024, un tribunal a rejeté une demande d’acquittement pour Mariyum Lal et Newsh Arooj. La Commission nationale catholique pour la justice et la paix continue de suivre leur affaire. Auparavant, Shagufta Kiran, une chrétienne, avait été condamnée à mort le 18 septembre 2020 pour avoir partagé des contenus jugés blasphématoires sur WhatsApp. Le climat de violence envers les minorités religieuses s’est intensifié en juin 2024, lorsque Nazil Gill Masih, un chrétien, a été tué par une foule qui le soupçonnait d’avoir brûlé des pages du Coran. Du dimanche 17 au vendredi 22 novembre 2024, l’association Aide à l’Église en détresse (AED) a organisé une « semaine rouge » pour sensibiliser le public au sort des chrétiens persécutés dans le monde. À cette occasion, les chrétiens du Pakistan ont manifesté pour demander la fin des meurtres de leurs coreligionnaires. Bien qu’aucune peine capitale n’ait été appliquée, ces affaires illustrent une recrudescence des accusations de blasphème, avec plus de 400 cas signalés depuis 2023.
Renforcement législatif et radicalisation des esprits
Le 17 janvier 2023, l’Assemblée nationale du Pakistan a voté un amendement à la loi sur le blasphème, augmentant la peine minimale à dix ans d’emprisonnement pour toute insulte aux proches du prophète Mohammed. Malgré la garantie constitutionnelle de la liberté religieuse, les lois deviennent de plus en plus strictes et sont souvent utilisées pour régler des conflits personnels ou commerciaux. La montée de groupes comme le Tehreek-e-Labbaik Pakistan (TLP) témoigne d’une radicalisation croissante. Ces groupes exercent des pressions sur les minorités religieuses et sont responsables de violences extrajudiciaires. La traque des accusations de blasphème s’est également déplacée vers les plateformes numériques, avec la création d’un tribunal spécial en septembre 2024 pour traiter ces cas.
L’ACAT-France demande l’arrêt des persécutions contre les chrétiens et appelle à mettre fin à l’utilisation abusive des lois sur le blasphème par les autorités pakistanaises, tout en plaidant pour une protection accrue des droits des minorités religieuses.