Depuis le 8 août 2025, la défenseure des droits humains Martha Lía Grajales est détenue arbitrairement par les autorités vénézuéliennes à Caracas. Du 8 au 11 août, sa famille et ses amis n’ont eu aucune nouvelle d’elle. Ce n’est que le 11 août que le lieu de sa détention a été révélé par une déclaration du parquet sur les réseaux sociaux. À ce jour, ni sa famille ni ses avocats n’ont pu lui rendre visite ni la contacter. Il est impératif d’interpeller le gouvernement vénézuélien afin qu’il prenne des mesures concrètes et rapides pour sa libération immédiate.
Martha Lía Grajales, avocate des communautés marginalisées
Martha Lía Grajales est une avocate et défenseuse des droits humains vénézuélienne, membre du Collectif Surgentes, une organisation dédiée à la défense des droits humains, soutenant les communautés marginalisées à travers la recherche, l’assistance technique et politique, ainsi que le plaidoyer pour des politiques publiques favorisant les droits humains et la démocratisation de la société. Elle œuvre pour le renforcement des capacités et l’organisation des groupes marginalisés, leur garantissant un accès à l’information concernant leurs droits et les mécanismes disponibles pour les faire respecter.
Que lui est – il reproché ?
Le 5 août 2025, Martha Lía Grajales a pris part à une veillée organisée par soixante mères devant la Cour suprême de justice du Venezuela, demandant la révision des dossiers de leurs fils injustement accusés de terrorisme à la suite des manifestations de 2024, qui ont suivi l’élection présidentielle de la même année, marquée par la réélection de Nicolás Maduro, entachée par des allégations de fraude électorale. Lors de cette manifestation pacifique, les participantes ont été attaquées par des civils armés, se comportant comme des paramilitaires, et ont volé leurs effets personnels, y compris la carte d’identité de Martha. Elle a tenté de déposer plainte contre ces agressions, mais le procureur général ainsi que le corps d’enquête scientifique de Caracas ont refusé de traiter sa plainte. Le 8 août, Martha et d’autres défenseurs des droits humains ont manifesté devant le Bureau des droits de l’homme des Nations unies à Caracas en solidarité avec les victimes des violences du 5 août. À l’issue de cette manifestation, elle a été arrêtée à un point de contrôle de la police géré par la Division des enquêtes criminelles (DIP) de la Police nationale bolivarienne (PNB). Martha a expliqué à la police que sa carte d’identité avait été volée lors de l’attaque. Soudain, une camionnette grise sans plaque d’immatriculation s’est approchée, et des agents non identifiés l’ont contrainte à monter à bord. Ses proches et des représentants de l’organisation PROVEA ont cherché à obtenir des informations sur sa situation dans plusieurs centres de détention, sans succès.
Détention arbitraire au regard du droit international
Le 9 août 2025, le président du tribunal pénal de la région métropolitaine de Caracas a refusé d’entendre une requête en habeas corpus en faveur de Martha Lía Grajales. Le 11 août 2025, le parquet a publié une déclaration sur le réseau social Instagram, confirmant la détention de Martha Lía Grajales « après qu’un mandat d’arrêt a été lancé contre elle pour des actions contre les institutions vénézuéliennes et la paix de la République ». La déclaration précise également que la défenseure est actuellement placée en détention provisoire pour des délits présumés d’« incitation à la haine, complot avec un gouvernement étranger et association ». PROVEA a ensuite été informée que Martha Lía Grajales était détenue à la Direction des enquêtes criminelles de la PNB à Maripérez, un centre de détention où PROVEA et le partenaire de la défenseure se sont rendus à quatre reprises sans obtenir d’informations sur son emplacement. Martha s’est vu attribuer un avocat commis d’office, bien qu’elle ait demandé à pouvoir contacter son propre avocat. À ce jour, ni la famille de Martha Lía Grajales ni ses avocats n’ont été autorisés à lui rendre visite ou à la contacter. Il s’agit d’une détention arbitraire au regard du droit international, et l’ACAT-France la condamne avec la plus grande fermeté.
Contexte
Depuis de nombreuses années, les défenseurs des droits humains travaillent sous le coup de règles restrictives. L’administration de Nicolás Maduro continue ce que celle de Hugo Chávez avait commencé, en réduisant drastiquement l’espace de la société civile et en ôtant toute légitimité aux défenseurs des droits humains, les accusant sans cesse de nuire à la démocratie vénézuélienne en collaborant soi-disant avec les États-Unis. Les défenseurs des droits humains sont quotidiennement discrédités et criminalisés par les médias contrôlés par l’État (télévision, radio, presse écrite).
Défendre les droits humains des plus démunis ne constitue pas un crime
L’arrestation et la détention au secret de Martha Lía Grajales témoignent de la criminalisation croissante et du ciblage systématique des défenseurs et défenseures des droits humains au Venezuela, en particulier à la suite des vastes manifestations qui ont suivi les élections présidentielles de 2024. Le cas de Martha Lía Grajales, ainsi que ceux des avocats Rocío San Miguel et Eduardo Torres, montre clairement que les défenseurs des droits humains sont détenus sans procédure régulière ni respect des garanties judiciaires. D’autres défenseurs des droits humains vénézuéliens sont maintenus en détention arbitraire, dont Javier Tarazona, Kennedy Tejeda, Eduardo Torres et Carlos Julio Rojas, ce dernier étant détenu au secret depuis le 30 juillet 2025.
Appel à l’action : Le Venezuela doit respecter ses engagements internationaux et le droit international
L’ACAT-France appelle les autorités vénézuéliennes à abandonner sans délai toutes les charges portées contre la défenseure des droits humains Martha Lía Grajales, étant donné qu’elles sont motivées par son engagement légitime et pacifique en faveur des droits humains. Il est impératif de garantir ses droits à une procédure régulière, à l’accès à la justice et à une représentation légale de son choix. Nous demandons de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer sa libération immédiate et inconditionnelle tout en protégeant son intégrité physique et psychologique ainsi que sa sécurité.
Il est également essentiel de veiller à ce que le traitement de Martha Lía Grajales durant sa détention respecte l’ensemble des conditions établies dans les « Principes fondamentaux relatifs à la protection de toute personne contre toute forme de détention ou emprisonnement », adoptés par l’Assemblée générale de l’ONU dans sa résolution 43/173 du 9 décembre 1988. Nous demandons aussi que Martha Lía Grajales puisse accéder à un avocat indépendant et au droit de visite de sa famille.
Le Venezuela doit mettre fin à ces violations des droits humains et assurer la protection des défenseurs et défenseures des droits humains. Nous exigeons que tous les défenseurs et défenseures des droits humains au Venezuela puissent exercer leurs activités pacifiques et légitimes sans subir de restrictions indûes et sans craindre d’être harcelés, menacés ou victimes de représailles.