Un frère et une soeur torturés et toujours en détention
Le 19 / 01 / 2016
Erick Iván et Verónica Razo Casales, frère et sœur, sont en détention préventive depuis quatre ans et demi. Sous la torture, ils ont été contraints d’avouer des enlèvements crapuleux. Bien que leurs tortures soient avérées, ils sont maintenus en prison. Les seules preuves retenues à leur encontre sont les dépositions faites par leurs co-accusés, vraisemblablement sous la torture !
Erick Iván et Verónica ont été arrêtés, sans mandat, sous les coups, le 8 juin 2011, en deux lieux distincts de México, par des policiers fédéraux en civil. Au commissariat, ils ont été menacés, frappés, électrocutés dans les parties génitales et soumis au simulacre de noyade. Vérónica a également été violée.
Alors qu’ils auraient dû être immédiatement transférés devant le ministère public, ils ne l’ont été que le lendemain à 15 heures. Le 10 juin, sans être assistés d’aucun avocat, ils ont été contraints de signer une déposition dans laquelle ils se déclaraient coupables de deux enlèvements crapuleux.
Après cela, leur mère, Austreberta Casales, a enfin pu leur rendre visite. Entretemps, Verónica avait été conduite à l’hôpital où, sur ordre du ministère public, elle n’a pu être auscultée qu’au-dessus de la ceinture.
Erick Iván et Verónica ont ensuite été placés sous arraigo (détention préalable à toute enquête et inculpation) pendant près de soixante jours, puis en détention préventive dans des prisons fédérales.
Bien que les tortures aient été établies par le Protocole d’Istanbul (examen physique et psychologique reconnu par l’ONU), le frère et la sœur sont toujours emprisonnés. Sont retenues à leur encontre les fausses déclarations des policiers sur le lieu d’arrestation et les dépositions de leurs co-accusés vraisemblablement faites sous la torture !
Aucune des cinq plaintes déposées par la mère des victimes n’a connu d’avancées. Une communication a été envoyée au Rapporteur spécial de l’ONU sur la torture le 6 août 2013.
Contexte
Les ravages de la « guerre contre le crime »
À son arrivée au pouvoir en décembre 2006, le président Felipe Calderón a déclaré la guerre à la délinquance organisée. D’une manière générale, les forces de l’ordre et l’appareil judiciaire ont procédé à des arrestations et condamnations massives en recourant à l’extorsion d’aveux et aux preuves illicites. Le bilan de la guerre de Calderón est estimé à au moins 60 000 morts, 26 000 victimes de disparition forcée, 250 000 déplacés internes et des milliers de personnes torturées au cours de leur garde à vue et de leur détention. Le président Enrique Peña Nieto, en place depuis décembre 2012, n’a pas changé la donne.
La torture comme première méthode d’enquête
La Commission nationale des droits de l’homme (CNDH) a enregistré une augmentation de 600 % des plaintes pour torture en dix ans. En avril 2014, le rapporteur spécial de l’ONU sur la torture a qualifié le recours à la torture d’« endémie inquiétante » au sein de « tous les corps de sécurité publique, policiers ou militaires ». Très souvent, les juges acceptent les confessions obtenues sous la torture, violant le droit des accusés à un procès équitable.
L’arraigo, un permis de torturer
En 2008, la Constitution a introduit l’arraigo, une forme de détention provisoire avant inculpation pour les personnes suspectées de délinquance organisée, dont la durée maximale est de 40 jours, renouvelable une fois. En théorie, il s’agit d’optimiser les conditions d’enquête. En pratique, cela se traduit par un accès très restrictif ‑ voire nul les premiers temps ‑ à une défense légale, à la famille, aux soins et par des tortures visant à faire avouer et fabriquer des preuves. Depuis avril 2014, et une décision de la Cour suprême de justice nationale, les placements sous arraigo ont beaucoup baissé, néanmoins l’ACAT milite toujours pour son abrogation totale.
Signez la pétition
Monsieur le Ministre de l'Intérieur,
Il a été établi que les preuves retenues à l'encontre de Verónica et Erick Iván Razo Casales ont été obtenues sous la torture. Sous arraigo, ils n’ont pas eu un accès régulier aux visites. Cependant, ils sont maintenus en détention préventive depuis plus de quatre ans et demi, soit bien au-delà du délai légal. Aucune des cinq plaintes déposées auprès du Parquet fédéral et de la Commission Nationale des Droits de l’Homme par la mère des victimes, Mme Austreberta Casales, n’a connu d’avancées.
Je vous demande instamment d’exiger :
- la libération immédiate de Verónica et Erick Iván Razo Casales ;
- une enquête rapide, exhaustive et impartiale pour torture et la poursuite pénale des responsables présumés ;
- l’abolition totale de l’arraigo.