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Votons droits de l'homme !

Aujourd’hui, en France, trop de droits fondamentaux sont bafoués. À l’heure de faire des choix politiques cruciaux, nous appelons tous nos concitoyens, responsables politiques, organisations de la société civile, Églises et religions et chaque citoyen à assurer que le respect de la dignité et des droits fondamentaux de chaque personne soit mise au centre de la vie politique, économique, sociale, culturelle et religieuse.
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Le 08 / 03 / 2017

La France se présente régulièrement comme « patrie des droits de l’homme ». Pourtant, nombre d’entre eux sont allègrement bafoués. Or nous sommes à un moment crucial : celui où la France s’apprête à élire son président, puis ses députés. Et la question doit être posée : quelle place ferons-nous à la protection des droits fondamentaux, au moment de glisser notre bulletin dans l’urne ?

À une époque où de multiples repères vacillent, où nos sociétés connaissent des changements brusques et parfois anxiogènes qui semblent brouiller les repères, il nous faut chercher à asseoir nos choix sur un socle solide, à arrimer notre jugement à des repères intangibles. La Déclaration universelle des droits de l’homme, parce qu’elle porte par essence le souci de protéger les plus vulnérables, doit être de ceux-là.

À la veille des élections, l’ACAT souhaite dire aujourd’hui son inquiétude de voir ces droits fondamentaux bafoués dans le champ d’action qui est le sien : non-respect du droit d’asile à l’égard des exilés, mauvais traitements et violence de la part de certains membres des forces de l’ordre, traitements inhumains ou dégradants fréquents à l’égard des détenus dans nos prisons.

Le déni des droits fondamentaux se constate notamment quand des acteurs politiques demandent, avec une légèreté irresponsable, à ce que la Convention européenne des droits de l’homme soit abandonnée, cherchant à affranchir la France des engagements qu’elle a souscrits.

Au regard de nos responsabilités, en tant que citoyens, autant que de nos convictions en tant que chrétiens, nous nous inquiétons de cet état de fait, en France et en Europe, dans le fonctionnement des institutions et de l’État.

À cette heure cruciale, l’ACAT appelle citoyens et candidats à veiller aux points suivants :

Sécurité et liberté : un équilibre difficile mais indispensable

L’érosion des droits se manifeste d’abord lorsque l’on décide de privilégier la sécurité sur les libertés : une tendance qui se développe depuis plusieurs années, y compris dans des courants croissants dans l’opinion publique. La sécurité est un enjeu décisif, spécialement dans le contexte actuel de menaces terroristes, mais les mesures nécessaires ne seront efficaces en profondeur et à long terme que si elles sont elles-mêmes structurellement respectueuses des droits fondamentaux de chacun, sans discrimination d’aucune sorte. De telles mesures doivent s’attaquer aux causes profondes des actes terroristes, et d’abord à ce qui conduit les terroristes à traiter leurs adversaires comme des sous-humains. Laisser nos droits se dégrader sous la menace terroriste, c’est déjà réagir dans le même registre, c’est entrer à notre tour dans ce jeu mortifère au lieu de le combattre.

En outre, la multiplication en France des lois sécuritaires, année après année depuis plus de quinze ans, est la preuve même que là n’est pas la réponse adéquate à l’insécurité. L’État d’urgence de même ne peut être prolongé sans risque pour nos libertés.

Le droit d’asile, un droit qui nous oblige

La France, comme l’ensemble des pays européens, s’est engagée à respecter le droit d’asile, ce droit fondamental pour ceux et celles qui ont été contraints de fuir un pays où leur existence même était menacée. Mais elle ne le fait pas. L’attitude des autorités françaises consiste à chercher à en renvoyer le plus grand nombre possible là d’où ils ont dû fuir, en prenant pour prétexte que ces pays seraient des pays « sûrs ». L’absence cruelle d’une politique migratoire digne de ce nom a pour conséquences de livrer les migrants au racket, voire même à la torture de la part des passeurs, de favoriser l’exploitation sexuelle des femmes et des mineurs ; elle conduit surtout à tous ces morts en Méditerranée dont la liste s’allonge année après année. Le droit d’asile, droit fondamental, exige une politique d’accueil humaine pour les demandeurs d’asile, dont les parcours sont souvent dramatiques et les traumatismes subis difficiles à formuler.

Les sommes considérables actuellement dépensées à maintenir ces personnes en dehors de nos frontières seraient bien mieux employées à des objectifs de solidarité. Construire des murs est non seulement totalement irréaliste, mais contraire aux valeurs qui sont celles de notre pays.

Nous demandons :

  • Un accès rapide à la procédure d’asile pour tous les demandeurs dans les délais légaux, un accueil et un hébergement respectueux de leur dignité ;
  • L’abandon de la procédure accélérée, qui mène à un traitement expéditif des demandes d’asile, et la suppression du concept de pays d’origine sûr ;
  • L’abandon du système injuste et inéquitable de Dublin, afin que les demandeurs d’asile aient le libre choix de leur pays d’accueil ;
  • La simplification de la procédure de réunification familiale pour les réfugiés ; vivre en famille est un droit ;
  • Le respect, à minima, des engagements pris par la France en 2015 : réinstallation et relocalisation de 30 000 demandeurs d’asile et réfugiés en deux ans.

En même temps, la peur de l’étranger, liée notamment au refus de la mondialisation, se répand de plus en plus dans l’opinion publique. Cette peur doit être prise en compte, surtout quand elle est éprouvée par ceux de nos concitoyens en situation de pauvreté et de marginalisation. S’y ajoute la peur du terrorisme, dont on rend souvent, de façon inadmissible, tous les musulmans complices, alors qu’ils en sont les premières victimes. Il est donc urgent d’agir, notamment au plan local, pour aider à surmonter ces peurs en créant des occasions de rencontre et de fraternisation entre les exilés et l’ensemble de la population.

Nous invitons donc toutes les personnes de bonne volonté à se joindre à la campagne (http://www.acatfrance.fr/accueildeletranger) que l’ACAT, avec d’autres organisations, notamment chrétiennes, développe actuellement d’abord pour accueillir les étrangers, et aussi, tout aussi important pour l’avenir, pour apprendre à coexister.

L’action des forces de l’ordre : pour davantage d’exemplarité et de transparence

Les forces de l’ordre sont indispensables à la bonne marche de notre société. On doit cependant déplorer, depuis plusieurs années, des actes de violence et un usage disproportionné de la force de la part de certains membres des forces de l’ordre, avec des conséquences irréversibles pour les victimes, comme l’a montré le rapport publié par l’ACAT en mars 2016 (http://www.acatfrance.fr/brisonslesilence). La confiance qui doit régner entre la population et les forces de l’ordre, mais aussi l’État de droit, est ébranlée.

Parmi les recommandations que nous avons adressées aux autorités françaises à la suite de notre enquête, nous soulignons et demandons:

  • La transparence en cas d’allégations de violences policières et la transparence quant aux sanctions disciplinaires prises dans de tels cas ;
  • L’interdiction des lanceurs de balle de défense (Flashball et LBD40) et la limitation très stricte de l’usage des armes à feu, des pistolets à impulsion électrique et des grenades explosives ;
  • La création d’un organe entièrement indépendant chargé d’enquêter sur les allégations de violences commis par les agents de police et de gendarmerie ;
  • Des sanctions appropriées lorsque les faits sont avérés ;
  • L’analyse de notre doctrine du maintien de l’ordre (ses évolutions, ses modalités, ses conséquences sur les relations police-population) et de celle des autres modèles européens.

Conditions carcérales

Trop de détenus vivent dans des conditions indignes, au sein de prisons vétustes ou au contraire des prisons modernes, mais déshumanisées.

La France doit mettre en œuvre au plus vite les recommandations faites par le Comité pour la prévention de la torture du Conseil de l’Europe, en particulier concernant les conditions de détention. L’incarcération n’est pas seulement une peine, elle doit devenir pour les détenus un temps permettant de se reconstruire humainement et de reprendre place dans la société. Or 80 % des détenus libérés sortent de prison sans préparation et sans accompagnement. Par ailleurs, les plans d’accroissement du parc carcéral qui se succèdent oublient systématiquement de s’intéresser à la préparation du retour de la personne détenue au sein de la société.

L’ACAT demande

  • un moratoire sur la construction des nouvelles prisons et une évaluation des programmes immobiliers pénitentiaires, passés et actuels, qui associe l’ensemble des acteurs concernés.
  • un renforcement des moyens alloués à la réinsertion, aux alternatives à l’incarcération et aux aménagements de peine.

Droits économiques et sociaux

Parallèlement, il importe de chercher des solutions pour proposer l’espoir d’un avenir à ceux de nos concitoyens qui se sentent en marge d’une société qui les ignore, en particulier SDF, chômeurs de longue durée, exclus du système, etc. C’est l’ensemble du contrat social et républicain qui est alors mis en cause. Ceux qui sont dans cette situation d’insécurité sociale ont le sentiment de ne pas être considérés comme des citoyens à part entière, de n’avoir ni leur place ni leur responsabilité dans la société : ils ressentent que leur dignité humaine est atteinte par cette exclusion. Tel est le cas de nombreux jeunes que l’école n’a pas réussi à qualifier et qui se marginalisent, voire se radicalisent.

NOTRE APPEL

Aujourd’hui, en France, trop de droits fondamentaux sont bafoués. À l’heure de faire des choix politiques cruciaux, nous appelons tous nos concitoyens, responsables politiques, organisations de la société civile, Églises et religions et chaque citoyen à assurer que le respect de la dignité et des droits fondamentaux de chaque personne soit mise au centre de la vie politique, économique, sociale, culturelle et religieuse.

Les droits de l’Homme sont reconnus aujourd’hui comme universels et indivisibles. Jamais nos propres droits ne doivent l’emporter sur les droits des autres, quels qu’ils soient, sous risque de voir le droit de la force remplacer la force du droit.

Les politiques à mettre en place, tout comme les initiatives citoyennes, doivent inscrire au premier rang de leurs préoccupations ceux dont les droits aujourd’hui sont trop facilement oubliés :

  • Les demandeurs d’asile, qui viennent ici parce que leur existence est menacée.
  • Les victimes des violences policières, auxquelles justice doit être rendue.
  • Les détenus qui, plus que d’autres, ont besoin de retrouver le sens de leur responsabilité et leur dignité.
  • Les laissés pour compte d’un système économique dominé par le profit financier, et qui n’est plus au service de l’Homme et du bien commun.

C’est seulement ainsi que la France restera fidèle à ses valeurs fondatrices : la liberté, l’égalité, et cette fraternité qui forge la cohésion entre les personnes et les communautés. Il est de notre responsabilité, à chacun, de nous mobiliser au service de ces valeurs, de savoir résister aux tendances qui en menacent actuellement les fondements.

Soyons exigeants et tenaces, avec nos gouvernants autant qu’avec nous-mêmes. Pour reprendre les mots de Victor Hugo dans Les Misérables, il nous appartient, en cette période électorale particulièrement, de « braver, persister, persévérer, (…), de tenir bon, tenir tête » car « voilà l'exemple dont les peuples ont besoin »

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