Vérité et Justice pour Amadou Koumé, décédé dans un commissariat parisien
Le 6 mars 2015, Amadou Koumé, âgé de 34 ans, est mort asphyxié au commissariat Louis Blanc du 10ème arrondissement de Paris.
Plus tôt dans la nuit du 5 mars, Amadou est interpellé très violemment dans un bar du 10ème arrondissement. Selon les témoins de la scène, alors qu’Amadou est décrit comme inoffensif, un policier de la Brigade anti-criminalité utilise à son encontre des gestes d’immobilisation extrêmement dangereux pouvant empêcher la personne de respirer. Amadou est plaqué au sol, le policier lui inflige une clé d’étranglement pour le menotter. À la suite de cette interpellation, c’est à moitié inconscient qu’Amadou Koumé est embarqué dans le fourgon de police. Il est emmené au commissariat du quartier mais à sa descente du fourgon, Amadou est agonisant. Deux heures après, une commandante de l’Inspection générale de la Police nationale (IGPN) signe l’acte de décès.
L'autopsie est accablante : la mort d'Amadou résulte d'un œdème pulmonaire survenu dans un contexte d'asphyxie avec traumatismes facial et cervical. L’autopsie fait également état de plusieurs hématomes sur le corps et le visage.
Le Procureur de Paris a ouvert une information judiciaire pour homicide involontaire contre X mais l’enquête, confiée à l’IGPN, avance difficilement.
De nombreuses zones d’ombre persistent : que s’est-il passé entre l’interpellation d’Amadou et son transfert au commissariat alors qu’il était menotté? Pourquoi l'acte de décès a été déclaré par un commandant de police et non par un médecin ? Pourquoi la police, au lendemain de la mort d’Amadou, parle de simple malaise à la famille ?
Six mois après sa mort, alors qu’un usage disproportionné de la force est fortement soupçonné et que de nombreux témoignages accréditent cette thèse, aucun juge d’instruction n’a été saisi de cette affaire. Le procureur n’a, à ce jour, identifié aucun des responsables et aucune information sérieuse pouvant expliquer la mort d’Amadou n’a été transmise à la famille.
Des techniques policières autorisées malgré leur dangerosité
Chaque année en France, de nombreuses personnes allèguent avoir subi des violences policières, voire décèdent au cours d’une intervention de police ou de gendarmerie. Les policiers et gendarmes disposent, afin d'exercer leur mission, de techniques d'intervention parfois très violentes leur permettant notamment de maîtriser une personne. Parmi ces techniques, certaines sont susceptibles de provoquer des douleurs extrêmes allant jusqu’à l’« asphyxie posturale » : clé d’étranglement, technique du pliage, placage ventral. La cage thoracique étant fortement compressée, les personnes peuvent étouffer sous la contrainte. L’ACAT a recensé au moins 8 décès liés à l’utilisation de telles techniques. La loi française autorise donc toujours des gestes mettant gravement en danger l’intégrité physique des personnes.
De la difficulté d’obtenir une enquête effective
Tout usage de la force illégal par les représentants de la loi constitue un mauvais traitement, a fortiori lorsqu’il entraine la mort, et contre lequel il convient d'agir. Le droit d’obtenir une enquête effective et indépendante en cas de mauvais traitements est la condition de la lutte contre l’impunité. La Convention des Nations unies contre la torture recommande qu'une enquête effective soit conduite dès qu'il existe un motif raisonnable de croire que des actes de torture ou des mauvais traitements ont été commis. Mais ces obligations sont peu respectées en France quand il s’agit de violences policières. Il s’avère extrêmement difficile d’obtenir une enquête effective dans des délais raisonnables. Les victimes de violences policières entendues par l’ACAT s’interrogent sur l'indépendance des enquêteurs et trouvent ces enquêtes trop longues et souvent extrêmement opaques.
Des policiers au-dessus des lois
En France, il est récurrent qu’à la suite d’enquêtes préliminaires bâclées, les plaintes pour violences policières soient classées sans suite par les procureurs de la République, comme ils en ont le pouvoir. Rares sont donc les affaires dans lesquelles la responsabilité des agents et de l’administration a été reconnue voire juste mise en question. Le problème ce n’est pas seulement que les policiers ne soient jamais condamnés mais qu’ils n’aient presque jamais à rendre de comptes. Pourtant, quand une opération de police se termine par un décès ou une atteinte corporelle irréversible, connaître les conditions dans lesquelles les forces de police ont opéré est légitime.
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