Acquittement d'une victime de torture
Zyed Debbabi a été acquitté et libéré le 25 avril 2014, après sept mois de détention provisoire. Le jeune homme de 25 ans avait été arrêté le 17 septembre dernier puis, selon ses dires et ceux de témoins, torturé par des agents du commissariat de Ben Arrous pour lui faire signer des aveux attestant qu’il avait vendu de la drogue, ce qu’il a toujours nié. L’ACAT a publié ce cas dans son dernier rapport Tunisie : un printemps inachevé.
L’instruction diligentée à la suite de la plainte pour torture déposée par l’avocat de la victime est toujours en cours et les policiers mis en cause par Zyed Debbabi ont été temporairement mutés. Toutefois, la famille de la victime a informé l’ACAT qu’elle avait été menacée et que des policiers qui avaient accepté de témoigner contre les tortionnaires avaient subi des mesures de rétorsion.
Le 16 septembre 2013, Zyeb Debbabi était au volant de la voiture de son père lorsque des amis lui ont demandé de les faire monter et de les déposer plus loin, ce qu’il a accepté de faire. Des agents de police, voyant ces jeunes monter dans la voiture, ont arrêté le véhicule pour procéder à un contrôle, sans doute parce que certains de ces jeunes avaient des antécédents judiciaires. L’un des jeunes a alors dit à Zyed Debbabi qu’il avait un joint sur lui. Ce dernier, pris de panique, a accéléré pour se soustraire au contrôle de police. Le jeune a jeté la drogue à l’extérieur de la voiture et Zyed Debbabi, qui roulait très vite, a fini par heurter un poteau. Les jeunes ont tous abandonné le véhicule et se sont enfuis. Le lendemain, Zyed Debbabi et son père se sont rendus au commissariat de Ben Arous pour régulariser la situation.
Contre toute attente, la police a arrêté le jeune homme sur ordre du responsable du commissariat, ce dernier signant d’ailleurs un procès-verbal d’arrestation mentionnant que Zyed Debbabi avait été arrêté à son domicile. Un agent a proposé au père de payer 2 000 dinars pour débloquer la situation, ce que le père a refusé de faire, appelant alors ses filles Kaouther et Intisar Debbabi pour qu’elles le rejoignent au commissariat. Le soir même, le dossier de Zyed Debbabi a été transmis à la police judiciaire de Ben Arous et le détenu a été transféré à Bouchoucha. La famille de Zyed Debbabi s’est rendue à la police judiciaire pour essayer de le faire libérer. Un responsable de la police judiciaire leur a recommandé une avocate pour s’occuper de ce dossier. En fait, selon la famille du détenu, cette avocate leur a demandé de lui verser 15 000 TDN en échange de la libération du jeune homme.
Le matin du 19 septembre 2013, les policiers de la police judiciaire sont venus chercher Zyed Debbabi à Bouchoucha et l’ont conduit au centre médical de Montfleury avec deux autres détenus. Zyed Debbabi est resté dans la voiture de police pendant que les deux autres détenus allaient faire des analyses. Bien que, selon le jeune homme, aucun prélèvement n’ait été effectué sur lui ce matin-là, les procès-verbaux de la police font référence à plusieurs analyses d’urine effectuées par le centre médical et qui se sont révélées négatives. Ce même jour, vers 10 heures, les policiers l’ont ramené à la police judiciaire de Ben Arous. Selon Zyed Debbabi, ils l’ont soumis à des actes de torture jusqu’à 15 heures. Ils l’auraient notamment placé dans la position du « poulet rôti » et roué de coups de pied. Ils auraient écrasé des cigarettes sur son dos et ses jambes et l'auraient frappé avec des matraques sur le torse, le dos, les fesses et les cuisses.