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Rapport moral 2017 : "Nous sommes tous frères"

Cette année 2016-2017 a été une année belle et riche pour l’ACAT, comme l’illustre notre Rapport d’Activités. Voici le rapport moral du Président, communiqué lors de l’assemblée générale.
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Gabriel Nissim
Le 11 / 04 / 2017

Gabriel Nissim, président de l’ACAT-France

 

Cette année 2016-2017 a été une année belle et riche pour l’ACAT, comme l’illustre notre Rapport d’Activités. C’est le résultat de l’engagement de tout l’ensemble de la communauté que nous formons : grâce à votre fidélité à chacun, nous avons, cette année encore, rempli la mission qui nous est confiée. Non seulement par nos actions, mais par notre engagement permanent : notre société, nos Eglises, ont besoin que nous soyons là, durablement, pour témoigner tangiblement qu’il est urgent de nous faire proches – de nous faire le prochain – des personnes qui sont victimes de la torture, de la violence, proches de ceux qui viennent nous demander l’asile pour pouvoir retrouver le goût de vivre. Cette fraternité agissante est décisive pour aider notre société à résister au climat délétère où beaucoup veulent limiter leur solidarité, leur humanité, au cercle étroit de leurs plus proches.

Heureusement, en France, ce printemps voit fleurir de multiples initiatives de la société civile, de nombreuses interpellations aux candidats aux élections : nous ne sommes pas les seuls à nous mobiliser, loin de là, et nous nous retrouvons au coude à coude avec beaucoup, dans nos Eglises et dans la société.

C’est dans ce contexte général qu’il faut situer le Rapport moral que je vous présente cette année. J’y aborderai deux points :

  1. Notre combat pour l’abolition de la torture et ce que le contexte actuel entraîne de nouveau pour notre action.
  2. Le fonctionnement de l’ACAT, et comment l’améliorer : 
  • D’une part pour le Secrétariat national ;
  • D’autre part pour l’ensemble des militants – nous tous – et en particulier pour nos 323 groupes actifs sur le terrain.

 

  1. La torture, aujourd’hui

Il y a nécessité, aujourd’hui, pour notre combat pour l’abolition de la torture, de prendre en compte l’actualité : un contexte nouveau, à bien des égards, du point de vue social, culturel, politique, en France et dans le monde.

Il est en effet indispensable pour nous de réfléchir aux raisons pour lesquelles, en France et ailleurs, on accepte plus facilement, on justifie à nouveau la pratique de la torture. Indispensable aussi de ne pas nous en tenir à des actions au coup par coup, aussi nécessaires soient-elles : il nous faut être conscients du lien profond entre, d’une part la torture, d’autre part l’ensemble des comportements de rejet, d’humiliation et finalement de déshumanisation de l’autre ; et plus largement tout un climat social et politique d’injustice, de désengagement.

Ce travail de réflexion et d’actualisation quant à notre combat pour l’abolition de la torture doit être, à mon sens, notre priorité pour les mois et les années qui viennent, en l’articulant sur les problèmes et la situation d’ensemble de notre société.

Pourquoi ?

D’abord parce que, depuis les années 2000, nous assistons partout à un recul de l’idée même des droits de l’Homme. Ces droits sont de plus en plus contestés par les opinions publiques, et les gouvernements sont trop heureux de s’engouffrer dans cette brèche pour pouvoir privilégier la sécurité sur nos libertés fondamentales – c’est le cas du maintien de l’état d’urgence en France. Il ne nous suffira donc pas d’agir auprès des gouvernements ou des instances internationales. Notre action pour l’abolition de la torture – et il en va de même pour l’abolition de la peine de mort – n’aura des chances de porter du fruit que si nous arrivons à ce que, au sein même de l’opinion publique, les droits de l’Homme ne reculent pas. Pas seulement mes droits à moi, mais le respect de la dignité humaine et des droits de l’autre. L’autre aussi différent soit-il.

Ne l’oublions pas, une des racines historiques de la torture, aux XVème ou XVIème siècles, c’est le rejet des hérétiques, de ceux qui se permettent d’être différents de la majorité et d’affirmer cette différence. Ceux-là, on devait les faire taire, les faire disparaître – on pouvait donc, on devait les torturer sans état d’âme. C’est exactement ce qui se passe aujourd’hui en Turquie. Mais partout, dans le contexte actuel de la mondialisation et des migrations, il y a cette peur, ce rejet, de l’autre différent, s’il se permet d’affirmer sa différence.

En réfléchissant ces derniers mois avec notre Commission Torture, (une Commission que je tiens à remercier, particulièrement son président, Michel Jordan, pour le beau travail effectué cette année), nous nous sommes rendu compte que l’acceptation de la torture est liée profondément à la définition que je donne de l’humain. Et là il y a deux éléments à  prendre en compte qui sont en relation directe avec la torture.

Qui, concrètement, est un être humain, que je reconnais pour mon semblable, dont je peux et je dois être frère, dont je suis responsable, qui a des droits ? Est-ce celui qui fait partie de mon village, de ma religion, celui qui partage la même identité ? Ou bien est-ce tout être humain, quelle que soit son identité particulière ? La tendance première, à toutes les époques et en tous lieux, c’est de limiter l’humanité au groupe de mes proches : « les miens ». Etendre cette fraternité à l’ensemble de l’humanité, sans distinction de langue, de religion, sans frontière, ne va pas du tout de soi. Et il est alors facile à un pouvoir politique, à partir du moment où il veut éliminer les opposants, les déviants (ceux qui ne sont pas de vrais aryens, comme disaient les nazis, ou de vrais communistes, comme disaient les Soviétiques), de faire accepter qu’ils soient persécutés, torturés, éliminés.

Ce que nous avons découvert, à la Commission Torture, c’est le rôle central que joue à cet égard la distinction entre « fratrie » et « fraternité ». La fratrie est  limitée au groupe des « miens ». La fraternité reconnait et affirme la ressemblance au-delà des différences. Cette distinction nous apparaît directement liée à l’acceptabilité de la torture pour ceux qui ne sont pas « les miens ». 

Le second élément à prendre en compte, c’est qu’il nous faut alors distinguer beaucoup plus entre d’une part la torture comme moyen de renseignement, et d’autre part la torture comme façon d’exclure de l’humanité celui qui n’est qu’un sous-humain, de le faire taire et de l’écraser. Les deux formes sont aussi perverses et aussi inacceptables l’une que l’autre mais le second type de torture est le plus révélateur de ce qu’est la torture en son fond : une négation de l’humanité de celui qu’on torture, jusqu’à ce que lui-même ne se considère plus comme un être humain digne de ce nom.

C’est ce qui se passe dans l’immense majorité des cas de torture aujourd’hui : la volonté de réduire au silence les opposants en Russie, en Chine, en Angola, en Turquie… La torture pour faire taire : un des médecins de Primo Levi nous disait combien la parole – le droit à la parole – est constitutif de l’être humain, et combien la parole est blessée chez les personnes qu’il soigne. Faire taire, comme cela se produit parfois jusque dans nos prisons françaises, c’est déshumaniser.

Déshumaniser, humilier : « l’humiliation fait le fond de la barbarie » écrit Olivier Abel. Et il ajoute : « Le plus grave, dans l’humiliation, c’est la manière dont on peut amener quelqu’un à se défaire de lui-même, de son estime de soi, pour survivre.[1] » Nous sommes là exactement dans ce qu’est la torture.

Ce n’est alors pas un hasard si, dans notre sondage de l’an dernier dans l’opinion française sur la torture, ce sont ceux qui rejettent le plus facilement les réfugiés et les migrants qui acceptent aussi le plus la torture, au point d’être souvent prêts à la pratiquer eux-mêmes. C’est pourquoi la campagne que nous avons lancée sur l’Accueil de l’étranger n’est pas seulement utile en raison de son lien étroit avec le respect du droit d’asile. Elle l’est aussi – et quand nous l’avons lancée, nous ne réalisions pas cela – parce qu’elle agit en profondeur contre les attitudes d’exclusion de l’autre, les mêmes qui sont à la racine de la torture. Elle promeut la fraternité, une fraternité universelle. Et seule la fraternité, la reconnaissance d’une fraternité fondamentale avec tous, sans exception d’aucune sorte, sera à même de rendre la torture inacceptable.

C’est pourquoi le maître-mot que je voudrais vous proposer pour l’année qui vient, c’est la fraternité.

La fraternité comme antidote fondamental à la torture.

Aujourd’hui, c’est là qu’il nous faut faire avancer notre combat pour l’abolition de la torture et de la peine de mort comme pour le respect du droit d’asile. C’est cela qu’il nous faut travailler pour le comprendre et le faire comprendre. Pour le vivre.

Je souligne à cet égard l’importance du travail de réflexion de la Commission Torture. Elle est trop peu nombreuse, il nous faut la renforcer. Je vous invite à y participer et à diffuser le fruit de sa réflexion.

Donc, aujourd’hui, face aux tendances à l’exclusion, à l’humiliation, à la déshumanisation de l’autre – à la torture – mettre en œuvre la fraternité, une fraternité universelle.  

 

  1. Le fonctionnement de notre Association

Dans la seconde partie de ce Rapport moral, nous allons nous demander comment améliorer nos capacités de remplir notre mandat

  • au sein du Secrétariat national ;
  • pour l’ensemble des membres militants,
  • et en particulier pour nos 323 groupes locaux sur le terrain.

 

1. La situation du Secrétariat national

Et d’abord le travail accompli au sein du Secrétariat national de l’ACAT et les conditions dans lesquelles ce travail se déroule.

Un travail que nous connaissons souvent assez mal, même si nous en apprécions beaucoup les résultats. Un travail que j’ai eu moi-même la chance, durant ces deux années de présidence, de découvrir et d’admirer de plus près. L’ACAT, à la différence de nombreuses autres ONG, n’est pas une ONG de spécialistes soutenue par de nombreux donateurs, mais une Association comptant de nombreux membres actifs et très engagés – nous tous. Mais cela n’enlève rien à l’importance de la tâche accomplie au sein de notre Secrétariat national, qui nous fournit les bases de notre action commune et qui prolonge cette action notamment par des interventions de lobbying et de plaidoyer auprès des instances nationales et internationales. Sans compter tout le travail d’organisation et de logistique, de communication, d’animation de la vie militante que vous savez. Je peux vous dire qu’au Secrétariat national, on ne chôme pas ! Et cela produit de beaux résultats, nous en sommes tous témoins : nous pouvons dire bravo et merci à chacune et chacun des salariés, aux cadres, et tout spécialement à Jean-Etienne de Linarès !

Mais il nous faut, nous, membres de l’ACAT, bien prendre la mesure de la disproportion entre la base militante et le Secrétariat : d’un côté, 28 régions, 323 groupes, 39.000 membres, sympathisants, donateurs, avec tout le travail que cela suppose – de l’autre 25 salariés qui ont parfois du mal à suffire à la tâche. C’est un travail considérable qu’accomplit le Secrétariat national avec des moyens limités.

Un second élément important est à prendre en considération dans le fonctionnement du Secrétariat national : beaucoup de nos professionnels sont venus travailler à l’ACAT par engagement militant. Ils souhaitent que ce qui est leur gagne-pain soit en même temps au service des causes, des valeurs et des personnes qui sont notre raison d’être. C’est pourquoi ils font leur travail avec enthousiasme – avec engagement et une grande implication personnelle, passion même parfois. Ils sont donc souvent moins des salariés au service d’une Association, qu’eux-mêmes des militants au service de cette cause qui est la nôtre.

Cette implication personnelle forte a nécessairement des répercutions sur leur façon de travailler, comme aussi sur les relations tant entre eux qu’avec nous les membres de l’ACAT, notamment les élus. En particulier, cela comporte pour beaucoup d’entre eux une charge émotionnelle forte dont il nous faut être conscient. D’autant plus que plusieurs d’entre eux sont directement au contact de personnes en grande souffrance. Bien sûr, de nombreux militants parmi nous sont eux aussi en contact direct avec des personnes en souffrance – aujourd’hui particulièrement les demandeurs d’asile. Mais quand c’est quotidiennement et huit heures par jour, cela entraîne des risques psycho-sociaux spécifiques, qui sont courants et bien connus dans les milieux associatifs, risques qu’il faut savoir mesurer et prévenir pour la santé et l’équilibre des personnes qui se dédient à ce type de travail. 

Depuis dix mois, nous bénéficions de la présence d’une responsable des Ressources Humaines, Sylvie de Lisle : c’est une partie importante de son travail que d’être attentive à ces problèmes. Et aussi, pour l’avenir, d’aider le Bureau et le Comité Directeur à réfléchir au management spécifique qui devra être mis en place pour répondre à ce type d’implication dans le travail et aux risques propres qu’il entraîne : le management au sein du monde associatif ne peut pas être le même que dans les entreprises commerciales.

En même temps, comme dans toute entreprise, des conflits peuvent survenir et entrainer des décisions difficiles à prendre, pour une direction, un bureau et un président. Cette année, nous avons été confrontés à ce genre de problème. Cela a été un moment difficile pour nous, nous l’avons traité avec le discernement voulu, dans le respect des valeurs de notre association et dans le cadre du mandat défini dans nos statuts qui confie cette responsabilité au Bureau exécutif, sous le contrôle du Comité Directeur.

S’occuper de personnes victimes de la torture ou de mauvais traitements, condamnées à mort ou de demandeurs d’asile n’est pas un travail comme les autres, nous devons tous en être davantage conscients. Cela demande une organisation du travail et un management spécifique, et aussi une attention particulière aux risques psycho-sociaux spécifiques que cela entraîne. C’est ce que nous avons commencé à mettre en place et qui va continuer.

 

2. Fonctionnement et vitalité de la vie militante

L’ACAT, il ne faut pas l’oublier, est d’abord et avant tout une association de militants et d’adhérents. Plus encore qu’une association, c’est une communauté. C’est la réalité depuis quarante ans, ce l’est aujourd’hui, cela peut et doit le rester demain, quelles que puissent être les évolutions dans les façons de militer. Nous ne suivons pas le modèle de fonctionnement des ONG où de très nombreux donateurs soutiennent un staff de professionnels, comme Médecins du Monde ou Avocats sans frontières, qui agissent en envoyant sur le terrain des professionnels spécialisés. Nous, nous avons besoin de membres, de militants, actifs, nombreux, pour peser sur les gouvernements, sur l’opinion publique, et aussi pour mobiliser nos Eglises, trop souvent à la traîne, hélas, dans ces domaines.

Or aujourd’hui, de nouvelles formes de mobilisation et de militance se font jour, notamment à travers Internet, les pétitions en ligne et les réseaux sociaux. Elles ne se substituent pas aux formes de militance traditionnelles mais s’y ajoutent. C’est la raison pour laquelle, depuis trois ans, nous avons développé notre site, instauré des pétitions en ligne. C’était nécessaire pour atteindre un nouveau public, et nous y avons de fait réussi. C’est un succès à poursuivre. Mais cela ne remplace aucunement la force de changement, plus encore de rayonnement, que nous représentons nous tous, sur le terrain. Et dans le contexte politique français actuel, il est plus que jamais décisif qu’il y ait des forces associatives organisées de résistance aux vents mauvais, des forces solidaires pour le respect des droits de l’Homme et pour la fraternité. « Résistance », comme le Comité directeur nous y a invités à l’automne dernier. Ces forces associatives de fraternité sont particulièrement vivantes en France, nous en faisons partie : il faut continuer dans cette ligne.

Dans le domaine de la militance, il faut également tenir compte que, du côté des jeunes, beaucoup s’engagent, mais souvent avec des façons de faire différentes par rapport aux générations précédentes. Pas tous – la preuve en est qu’il y a des jeunes ici parmi nous, et c’est une joie pour nous tous ! Bien d’autres jeunes sont heureux de découvrir l’ACAT, comme à Taizé, où nous allons régulièrement. Mieux, des mouvements chrétiens de jeunes (la JOC, Jeunesse ouvrière chrétienne, le MRJC, Mouvement rural des jeunes chrétiens) ont pris l’initiative de prendre contact avec nous ces derniers mois : voilà des ouvertures très encourageantes que nous allons approfondir pour mettre en place des collaborations durables.

D’où une première piste à poursuivre : il nous faut reprendre rapidement ce que nous avions commencé en direction des jeunes. Nous n’avons pratiquement pas avancé cette année sur ce chantier, malgré les efforts persévérants  de plusieurs, en particulier Estelle Rose et Thomas Lafont, que je remercie beaucoup. La raison principale de ce retard est, comme pour d’autres secteurs de la Vie militante, deux absences de longue durée parmi les salariés chargés de la Vie militante. Nous allons, d’ici quelques semaines, retrouver une situation normale au Secrétariat : une embauche est en cours et un retour proche.

Seconde piste, amorcée l’an dernier : le recrutement de jeunes seniors. Là aussi, même retard, pour les mêmes raisons. Mais les choses se remettent en route, depuis que la Commission nationale d’Animation (CNA) a décidé de reprendre cette campagne à son compte, sous la direction d’Estelle Rose et de Jean-Marie Delacroix – je m’en réjouis et je les remercie. Je vous invite à venir renforcer cette Commission. Je vous invite aussi à être attentifs aux initiatives nouvelles que la CNA va proposer : n’hésitez pas à relayer ces initiatives et à les mettre en œuvre dans chacune de nos régions, avec l’aide des correspondants régionaux qui seront désignés pour s’en faire le relais.

 

3. La vitalité des groupes locaux

Le vœu formulé par la région Alsace-Moselle sur la nécessité de se soucier davantage de la vitalité des groupes locaux est tout à fait pertinent. Certes, il n’y a pas de recette-miracle. Mais deux suggestions peuvent nous aider.

La première concerne les manifestations culturelles de diverses sortes que Coline Aymard, du pôle Vie militante, a développées avec succès ces derniers mois. L’une de ces manifestions, à Paris, a entraîné rien moins que la création d’un nouveau groupe local ! C’est une piste très prometteuse, car c’est bien souvent d’abord l’émotion devant des personnes victimes qui incitera de nouveaux militants à rejoindre notre combat. C’est d’ailleurs ainsi que l’ACAT a commencé, avec nos fondatrices. Et aujourd’hui comme hier, quand on est ému, touché par la souffrance de quelqu’un, c’est là qu’il y des chances qu’on se mobilise. Cela ne suffit évidemment pas : on ne peut en rester à l’émotion – il faut ensuite passer à la prise de conscience, à la réflexion puis à l’action. Mais c’est bien l’émotion qui déclenchera, le plus souvent, le processus qui conduit à l’engagement. Les diverses propositions que Coline Aymard fait dans le domaine des événements culturels – films, expositions, etc. – sont donc à utiliser sans retenue.

 

 Une deuxième suggestion peut être trouvée dans la campagne actuellement en cours pour l’accueil des étrangers. Il faut souligner une caractéristique tout à fait nouvelle de cette campagne : elle est menée en commun avec l’Eglise Protestante unie de France, à travers plusieurs de ses paroisses mais aussi ses responsables, le service catholique de la Pastorale des Migrants (là aussi à travers un certain nombre de ses équipes locales) et le Service jésuite des Réfugiés (JRS). Ces collaborations sont dues en grande partie à la qualité remarquable du Dossier très réussi, et très apprécié, que nous avons rédigé et publié pour cette campagne : le groupe de travail qui l’a produit a travaillé d’arrache-pied ! Bravo et un grand merci à Elizabeth Laîné et à tout le groupe.

Mais ce qu’il faut souligner ici, pour la vitalité de nos groupes locaux, c’est que cette collaboration avec des organismes divers a été l’occasion de rencontres, de collaborations, de contacts qui porteront nécessairement des fruits pour l’avenir.  Nous avons tout intérêt à continuer à développer ainsi des collaborations et des liens au plan local, sans hésiter à participer, de notre côté, aux initiatives proposées par d’autres sur des thématiques de solidarité qui nous sont communes. D’autant plus que, dans le climat politique actuel, il est capital de renforcer les réseaux de la société civile pour faire avancer l’ensemble de notre pays, de notre Europe, de notre monde, dans la direction que nous voulons.

Nous revenons ainsi à ce que nous disions dans la première partie de ce Rapport concernant l’abolition de la torture : notre mandat ne pourra avancer que dans un climat global où nous saurons, à plusieurs, lever bien haut l’étendard de la dignité humaine universelle et d’une fraternité sans frontières.

 

La fraternité, telle sera ma conclusion.

La torture a existé à beaucoup d’époques et dans beaucoup d’endroits, et cela continuera, hélas, il ne faut pas se faire d’illusion. Comme aussi, venant de la même source, la tentation de s’enfermer dans le cercle étroit des « miens » : moi, c’est moi, et toi, tais-toi, moi chez moi et toi chez toi… C’est là quelque chose de beaucoup plus profondément enraciné dans notre humanité que nous ne l’aurions supposé, et toujours prêt à resurgir à la première occasion. La mondialisation actuelle en est une telle occasion,  nous pouvons le constater.

Seuls alors une action, un engagement de longue durée en faveur de la fraternité universelle, du respect profond de l’autre, même s’il est différent de moi, seront à même de changer les choses durablement pour l’abolition de la torture, de la peine de mort, pour l’accueil des demandeurs d’asile.

 

Nous sommes tous frères. Mais, là comme ailleurs, en matière d’humanité, nous avons à devenir ce que nous sommes – devenir ce que notre Père à tous engendre en chacun de nous par son Esprit d’amour.

 


[1] Cf. son article « Arrêtons l’humiliation », Revue Projet, n°354, octobre 2016, p. 79-80

Télécharger le rapport moral du Président

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