Absence d’enquête judiciaire sur des allégations de tortures contre deux détenus
Messieurs Abdallahi Matallah Seck et Moussa Bilal Biram – militants de l'Initiative pour la résurgence du mouvement abolitionniste (IRA) – indiquent avoir fait l’objet de tortures en détention. Or, malgré leurs témoignages et la présence de stigmates de violence sur leurs corps, aucune enquête n’a, jusqu’à ce jour, été ouverte devant la justice, en violation du droit mauritanien.
Début juillet 2016, Messieurs Aballahi Matallah Seck et Moussa Bilal Biram auraient fait l’objet de tortures durant leur détention au secret au sein de la 2ème Compagnie de police à Tevragh Zeina, commune de Nouakchott, période qui correspond également à leur garde-à-vue.
Ils auraient été pendant de longues périodes couchés sur le ventre au sol, dénudés et enchaînés : avec une longue chaîne en anneaux métalliques partant des mains menottées dans le dos, parcourant la longueur du dos et arrivant au niveau des pieds également attachés. A plusieurs reprises, des agents de police auraient brutalement tiré les chaînes provoquant chez les détenus des contorsions très douloureuses. Un soir, l’un des détenus aurait fait l’objet de torture au niveau de son appareil génital. Un agent de police aurait saisi par un nœud son sexe et aurait tiré dessus avec force, à plusieurs reprises jusqu’à lui faire perdre connaissance.
Ni la Cour criminelle de Nouakchott, ni la Cour d'appel de Zouerate n'ont pris en compte ces allégations de tortures formulées par les prévenus et demandé l'ouverture d'une enquête conformément au droit mauritanien. Il est impératif que la justice mauritanienne se saisisse de ce dossier.
Contexte
Des allégations de tortures formulées devant la justice
Messieurs Abdallahi Matallah Seck et Moussa Bilal Biram, au moment de leur déferrement devant le Parquet, le 12 juillet 2016, présentaient des stigmates de violence, notamment des lésions au niveau des mains dû aux menottes trop serrées. Devant la Cour criminelle de Nouakchott – en août 2016 - puis devant la Cour d'appel de Zouerate – en novembre 2016 - les deux détenus ont allégué avoir fait l’objet de tortures. Neuf agents des forces de police auraient été formellement identifiés dans la commission de ces violences. Pourtant, aucune instance judiciaire ne s’est saisie de ces informations et demandé l'ouverture d'une enquête sur ces allégations de tortures.
Condamnés à trois ans de prison pour « attroupement non armé, avoir empêché la police de faire son travail et appartenance à une organisation non reconnue ».
Messieurs Abdallahi Matallah Seck et Moussa Bilal Biram ont été arrêtés, fin juin-début juillet 2016, à la suite d’émeutes spontanées de membres de la communauté haratine dans le bidonville de Ksar après que les autorités aient engagé une opération d’expulsion de plusieurs familles. Aucun des deux n’était pourtant présent sur les lieux de ces violences spontanées. Ils ont été condamnés, le 18 novembre 2016, par la Cour d'appel de Zouerate à une peine de trois ans de prison ferme pour « attroupement non armé, avoir empêché la police de faire son travail et appartenance à une organisation non reconnue ».
Une volonté de réduire à néant l’IRA-Mauritanie
Depuis la création de l’Initiative pour la résurgence du mouvement abolitionniste (IRA-Mauritanie) en 2008, les autorités mauritaniennes n’ont toujours pas reconnu le statut de cette association malgré plusieurs demandes en ce sens. Au contraire, depuis plusieurs années, les membres de l’IRA font l’objet d’une vague ininterrompue d’intimidations, de menaces de mort, d’arrestations et de harcèlements judiciaires destinés à réduire à néant cette organisation qui développe ses antennes à travers tout le pays au sein de la communauté haratine (musulmans négro-mauritaniens victimes d’esclavage) et au niveau international avec les associations de lutte contre l’esclavage.