Yu Wensheng, jamais vraiment libre
Mobilisons-nous pour la libération de Yu Wensheng !
Téléchargez la lettre, personnalisez-la avec vos coordonnées et retournez-la par voie postale ou par voie électronique à l'ambassadeur de l'Union européenne en Chine.
Qui est Yu Wensheng ?
Avocat, il a défendu des militants des droits civils, un engagement en faveur des droits humains qui lui a déjà valu d’être la cible de répressions. Il a été arrêté en janvier 2018 alors qu’il emmenait son fils à l’école puis placé en résidence surveillée. L’ACAT-France s’était alors fortement mobilisée pour sa libération. Officiellement inculpé pour « subversion » en février 2019, il est libéré trois ans plus tard. Quant à son épouse, elle n’a été autorisée à lui rendre visite qu’en 2021. Par ailleurs, elle faisait l’objet d’une surveillance stricte de la part du régime, qui semble avoir perduré jusqu’à cette deuxième arrestation.
Une procédure particulièrement opaque
Le 13 avril 2023, Yu Wensheng a annoncé sur le réseau social Twitter que lui et son épouse ont été soudainement arrêtés dans le métro par quatre officiers de police chinois, alors qu’ils se rendaient à un rendez-vous à l’ambassade de l’Union européenne, un procédé similaire à sa première arrestation. Selon les infos recueillies par les ONG Chinese Human Right Defenders (CHRD) et Rights and Livelihood Watch, ils ont été emmenés au bureau de police de Shijingshan Bajiao. Deux jours plus tard, sept officiers de police ont notifié à leur fils leur détention, l’informant que Yu Wensheng et son épouse étaient accusés de « chercher des querelles et provoquer des troubles », avant d’illégalement perquisitionner leur domicile. Le lendemain, deux avocats et connaissances du couple ont sollicité l’autorisation de leur fils de représenter ses parents. A cette occasion, ils ont constaté que des officiers de police semblaient s’être installés dans l’appartement. En outre, ces derniers leur ont refusé cette représentation, arguant que Yu Wensheng et son épouse bénéficiaient déjà de deux avocats commis d’office. L’ensemble de ces éléments est en violation flagrante des standards internationaux sur le procès équitable.
Enfin, il est inquiétant de demeurer sans nouvelles de Yu Wensheng et de Xu Yan, plus d’un mois après leur arrestation, d’autant que Yu Wensheng a déclaré qu’il avait fait l’objet de torture lors de sa précédente détention. À ce jour, les autorités chinoises n’ont toujours pas confirmé leur détention.
Une réaction en demi-teinte de la communauté internationale
Yu Wensheng et son épouse avaient rendez-vous avec l’ambassadeur de l’Union européenne en Chine, un diplomate européen et des représentants de la société civile. Rapidement, suite à leur arrestation, l’ambassade de l’Union européenne a déposé une plainte auprès du ministère des affaires étrangères chinois et a publiquement appelé à leur libération immédiate. Le porte-parole de l’Union européenne a ajouté que leur arrestation était « très préoccupante ». Or, un mois après, leur situation ne semble pas avoir évolué. Par ailleurs, peu de visibilité a été donnée à cette arrestation, pourtant particulièrement inquiétante. L’ACAT-France s’interroge sur les suites données à cette plainte et demande des moyens d’action renforcés pour obtenir la libération immédiate de Yu Wensheng et Xu Yan.
Contexte
Eric Mamer, le porte-parole en chef de la Commission européenne, a déclaré que, « [la chronologie des évènements] semble indiquer que les autorités chinoises avaient connaissance du rendez-vous » entre Yu Wensheng, son épouse et la diplomatie européenne. Ce qui confirmerait que, depuis sa libération en 2022, Yu Wensheng a fait l’objet d’une surveillance continue des autorités chinoises. Une conclusion conforme à leurs pratiques sécuritaires de plus en plus strictes, entravant l’exercice de la liberté d’expression hors du périmètre défini par le Parti communiste chinois.
Une arrestation représentative des sujets interdits en Chine…
Considérant la difficulté à obtenir des informations sur les motifs précis d’arrestations de défenseurs et défenseures des droits humains –les autorités chinoises se contentant de communiquer sur des charges vagues retenues à leur encontre, telles que « subversion » ou « chercher des querelles et provoquer des troubles » – l’incertitude demeure quant aux raisons exactes pour lesquelles Yu Wensheng et Xu Yan ont été arrêtés. Cependant, leur cas est emblématique des sujets sur lesquels la Chine n’a aucune tolérance.
Tout d’abord, il apparaît que les autorités chinoises ont déjà arrêté à plusieurs reprises des défenseurs et défenseures seulement pour avoir pris publiquement position en faveur de leurs semblables. Plus particulièrement, il semble qu’il soit impossible de s’exprimer en faveur de Ding Jiaxi et Xu Zhiyong – deux activistes également soutenus par l’ACAT-France. En effet, une autre defenseure, Li Qiaochu, est actuellement détenue de manière arbitraire pour avoir révélé sur internet la torture dont ces deux derniers ont fait l’objet en détention. Or, de la même manière, deux jours avant son arrestation, Yu Wensheng s’est exprimé sur son compte twitter, indiquant que la sécurité politique du district de Shijingshan, à Pékin, est revenue le voir « à cause de ce tweet », désignant par là un précédent message par lequel il exprimait sa solidarité envers les familles de Ding Jiaxi et Xu Zhiyong. Il a également condamné les verdicts rendus lors de leur procès, lesquels n’ont été rendus publics que récemment. Puis, cette arrestation coïncide avec la publication quelques heures plus tôt, par le vice-président de la commission européenne, Josep Borrell, du discours qu’il devait donner en Chine, où il n’a pas pu se rendre. Dans ce discours, il affirme que « toute tentative de changer le statu quo [de Taïwan] par la force serait inacceptable ». Bien qu’il ne soit pas possible d’affirmer que Yu Wensheng et son épouse ont été arrêtés pour cette raison, cet évènement s’inscrit toutefois dans le cadre d’une politique assumée des autorités chinoises de maintenir sa souveraineté et son intégrité à tout prix sur son territoire. Aucune ingérence n’est tolérée dans les affaires du pays, tant de la part de la diplomatie européenne que des institutions internationales, encore moins sur la question de Taïwan qui a récemment focalisé une partie de l’attention médiatique.
… Et des répressions continues envers les défenseurs des droits humains
Cette année marque les vingt-cinq ans de l’adoption, par la Chine, de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’homme de l’ONU, laquelle prévoit que « les défenseurs des droits de l’homme doivent être appuyés et protégés dans le cadre de leur activité », dont découlent de nombreux droits et protections qui leur sont accordés, des dispositions que, à l’évidence, elle ne respecte pas. En effet, de nombreuses organisations internationales soulignent les répressions continues dont les défenseurs des droits humais font l’objet. L’ACAT-France se joint aux déclarations de divers États, dont la France, pour demander à y mettre fin.