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Droits de l’homme : après le 13 novembre, rester vigilant

Les attentats du 13 novembre supposent une réaction forte des pouvoirs publics français. Cependant, les organisations de défense des droits de l’homme doivent rester vigilantes afin que la lutte antiterroriste ne soit pas menée au détriment des libertés et des droits fondamentaux.
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Mémorial place de la République après les attentats du 13 novembre 2015. Crédits : Roberto Maldeno Flickr Creative Commons
Le 30 / 11 / 2015

Le 13 novembre, la France a connu l’attentat le plus meurtrier de la Ve République. Nos pensées vont d’abord aux victimes et à leurs familles. Ce crime témoigne d’un mépris absolu pour la dignité humaine et suppose une réaction forte des pouvoirs publics français. Cependant, la société civile, et plus particulièrement les organisations de défense des droits de l’homme, doivent rester vigilantes afin que la lutte antiterroriste ne soit pas menée au détriment des libertés et des droits fondamentaux.

Nous devons tout d’abord être attentifs au fait que la torture ne puisse jamais être évoquée comme méthode d’enquête dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. Le scénario de la bombe à retardement, selon lequel la torture serait nécessaire pour faire parler un terroriste et sauver des vies, est une escroquerie intellectuelle. Nous ne vivons pas dans le monde de Jack Bauer. Ne reproduisons pas les tragiques erreurs du gouvernement Bush.

En second lieu, la France ne peut renoncer à sa tradition d’accueil de l’étranger. Le droit d’asile, qui permet aux personnes persécutées de trouver refuge hors de leur pays, ne doit pas être une victime collatérale de la réponse aux attentats de Paris. Plus généralement, c’est le respect de l’autre – l’étranger, le réfugié, celui dont l’identité diffère de la nôtre – qui doit être sauvegardé, aussi bien dans le cœur de nos concitoyens que parmi les principes qui guident l’action publique.

La réponse au terrorisme ne peut se réduire à une intensification des opérations militaires. Les bombardements aériens sont avant tout la manifestation d’une virile gesticulation destinée à laisser croire qu’on agit avec détermination. Les leçons de l’histoire ont montré qu’elles n’ont guère d’utilité stratégique sur le terrain si ce n’est celle d’attiser les haines.

Méfions-nous enfin de l’inflation de lois sécuritaires et des dérives rendues possibles par l’état d’urgence. La restriction des libertés fondamentales ne doit pas s’inscrire dans le long terme. La lutte contre le terrorisme ne signifie pas que la police française a désormais carte blanche en ce qui concerne l’usage de la force, ce dernier devant impérativement respecter les principes de stricte nécessité et de proportionnalité. Les faits semblent déjà justifier nos craintes : des perquisitions abusives et des interpellations d’une violence totalement disproportionnée se sont déjà produites. Que certains éléments de la police estiment qu’ils n’auront pas de compte à rendre à la justice et c’est la porte ouverte à tous les abus. Comment pourrait-il en être autrement quand notre premier ministre doute de la nécessité de vérifier la constitutionalité des textes votés ? Ou quand le gouvernement informe le Conseil de l’Europe que certaines mesures, prises dans le cadre de l’état d’urgence, « sont susceptibles de nécessiter une dérogation à certains droits garantis par la Convention européenne des droits de l’homme. » ? La lutte contre ceux qui nient les valeurs fondatrices de la République passe aussi par le devoir d’exemplarité des forces de l’ordre.

En démocratie, les mesures d’exception sont le plus souvent synonymes de recul de l’Etat de droit. S’engager sur cette pente, ce serait donner raison aux terroristes. Affirmer, respecter et faire respecter les valeurs de notre démocratie, c’est au contraire combattre les idéologies qui sous-tendent leur action. Sans la justice, la force militaire ou policière est désarmée, et ne peut seule espérer vaincre le terrorisme djihadiste.

Jean-Etienne de Linares, délégué général de l'ACAT @JEdeLinares

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